Le salut économique par la croissance est aujourd'hui la figure de proue de la politique française. Pomme d'une relative concorde avec Berlin, non sans pépins, cette stratégie va sans doute trouver un écho, sur le fond plus que sur la forme, d'ailleurs. Reste que ce fruit encore vert, manière d'épée de Damoclès, risque d'exploser sous les effets de la pesanteur toute newtonienne d'une Grèce qui secoue actuellement le pommier au-delà du raisonnable. Peu avant de rendre les clés du Quai d'Orsay, Alain Juppé jugeait «extrêmement préoccupante» la situation grecque, après la percée aux législatives des partis extrémistes, farouchement opposés aux mesures de rigueur conjointement imposées par l'Union européenne et le Fonds monétaire international. La France et l'Allemagne doivent en fait affronter un double front. Celui, systémique, d'un modèle européen qui cherche son second souffle et celui, beaucoup plus inquiétant, ouvert par les états membres les plus fragiles qui tentent de trouver une issue à leur funeste destin, quitte à provoquer le déluge. Quittant Bercy, François Baroin faisait également référence à d'éventuels apprentis-sorciers prêts à abandonner la zone euro face à des épreuves jugées –surtout par les populations- totalement insurmontables. Pour lui, l'hypothèse d'une sortie de la Grèce coûterait «50 milliards nets à l'État français», sans compter la nette «dépréciation des titres que détiennent les banques et les assurances dans leurs portefeuilles». Paradoxalement, à travers leur fragilité extrême, Athènes et le président Carolos Papoulias paraissent avoir en main les cartes de la stabilité européenne ; un anti-atout qui pourrait rapidement mettre à mal la croissance espérée.
Les rigueurs de la croissance
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