Affiches Parisiennes : Votre cabinet a été récompensé pour son engagement Pro bono, pouvez-vous nous en dire davantage ?
Aurélie Dantzikian-Frachon : Oui, bien sûr. En fait, le Barreau de Lyon nous a remis fin septembre le Trophée de la générosité lors de la première édition de la Soirée des solidarités organisée à l’occasion de la célébration de l'anniversaire de l'abolition de la peine de mort par Robert Badinter. Ce trophée a pour vocation de récompenser le cabinet qui a eu un maximum d’impact pour le bien public. Il vient récompenser les actions des avocats, des collaborateurs et des salariés de notre cabinet qui, avec la création en interne d’un groupe stratégique - le Club Solidaire, ont souhaité trouver ensemble la meilleure façon de s’investir de façon concrète dans la vie de la cité.
Notre groupe stratégique, composé de 17 membres intéressés et motivés au sein du cabinet, avait ainsi fait l'effort de recenser l'ensemble des actions qui avaient été réalisées depuis ces dernières années.
Nous sommes mobilisés autour de quatre objectifs. Le premier est éducatif et vise à permettre à des personnes qui n'ont pas de réseau ni de relations de mieux intégrer la profession d’avocat, typiquement via l'accueil de stagiaires. Le deuxième tourne autour de l’aide aux communautés, avec notamment des dons de vêtements et de jouets et la participation à ‘la boîte de Noël’. Le troisième a une vocation sportive, le dernier, environnementale.
Via nos deux déménagements, à Paris puis à Lyon, nous avons pu mettre en place des actions qui permettent de limiter l'impact environnemental de nos bureaux, avec notamment la réduction du plastique via l’utilisation de gourdes et de fontaines à eau, davantage de recyclage et une politique zéro papier avec l'installation de double-écrans sur tous les postes de travail et le changement du parc de copieurs pour faciliter les scans et diminuer le nombre d’impressions.
En parallèle, comme notre Club Solidaire a été identifié, certaines startups à impact environnemental nous ont demandé si nous pouvions les accompagner pro bono, ce que nous avons fait. Nous avons notamment travaillé avec une start-up green sur la transition énergétique. Nous sommes également partenaires de Time for the Planet, dont je suis membre du conseil de surveillance sur mon temps libre, ce qui nous permet de participer à des actions bénévoles à impact positif sur l'environnement ou sur les communautés.
« Ce trophée a pour vocation de récompenser le cabinet qui a eu un maximum d’impact pour le bien public. »
Au cours de ces 4 dernières années, nous avons effectivement déployé plusieurs actions au service du bien commun. Du coup, le groupe a trouvé non seulement très gratifiant de pouvoir faire un arrêt sur image de tout ce qui a été entrepris en vue de remettre un dossier pour soumissionner au trophée des solidarités du Barreau mais encore d’avoir été récompensé pour les actions entreprises.
A.P. : Votre activité Pro bono a-t-elle augmenté depuis le début de la Crise-Covid ?
A. D-F : Lorsque nous avons été confinés le 17 mars 2020, une grosse partie de notre activité, liée notamment à la fusion-acquisition, a été suspendue. Nous avons donc été très en proximité non seulement avec nos clients mais aussi des réseaux économiques, en nous mettant à leur disposition.
Pour un cabinet d’affaires, ce n’est pas toujours fréquent d'avoir autant d'actions bénévoles mais l’avocat est là pour cela, et particulièrement en temps de crise. Pour nous, il est vraiment important d'être un acteur de la cité, c’est une manière de rendre pour partie ce que nous avons reçu et de mettre en valeur le rôle de l'avocat en tant qu'acteur sociétal.
A.P. : Vous avez été présidente du réseau PLG International Lawyers. Les réseaux internationaux d’avocats sont-ils importants pour votre cabinet ?
A. D-F : Tout à fait. Je reviens justement de Lisbonneoù j’ai assisté à notre première réunion en présentiel depuis 18 mois et je vous laisse imaginer le plaisir à nous retrouver. Les réseaux sont importants pour nous à deux titres. Premièrement pour mieux accompagner nos clients à l'étranger. Par exemple, en ce moment nous accompagnons une grosse opération de fusac sur trois pays. Il est essentiel de pouvoir recourir à la meilleure expertise, à des professionnels qui travaillent comme nous, avec une approche pragmatique et transparente au bénéfice du client qui doit avoir l'impression d'être servi de la meilleure manière quel que soit le pays, mais sans forcément faire partie d'un cabinet intégré.
Deuxièmement, c'est aussi important, en termes d'attractivité du territoire, de pouvoir bien traiter l’accompagnement d’entreprises étrangères en France. J'ai travaillé à Philadelphie pendant une période avec des entreprises américaines. A ce titre, j’ai les bases de leur culture juridique et de la négociation, ainsi que la capacité de leur expliquer assez rapidement ce qui est différent ici par rapport à leur système juridique. C'est très apprécié par les entreprises étrangères d'avoir, au-delà d’une simple compétence linguistique, une véritable connaissance culturelle. Pour encourager cela chez nos avocats, nous avons mis en place au sein du réseau un programme d'échanges pour les moins de 35 ans qui leur permet de partir jusqu'à deux mois dans un cabinet membre pour y travailler. Nous avons déjà envoyé au moins 7 collaborateurs, que ce soit en Angleterre, aux États-Unis, en Allemagne et nous avons accueilli une avocate polonaise, une Chilienne ainsi qu’une anglaise, et nous aimerions en accueillir encore plus. Il est vraiment important d’accroître nos compétences interculturelles.
A.P. : De votre côté, quels sont vos domaines de spécialité et depuis quand exercez-vous chez Lamy Lexel ?
A. D-F : Je suis arrivée chez Lamy Lexel il y a 18 ans et je gère aujourd’hui le département Contrats, Concurrence, Propriété Intellectuelle du cabinet. Ce dernier a beaucoup évolué puisqu’au début nous faisions davantage de contrats et de concurrence, aussi appelé droit économique, puis, avec l’essor des nouvelles technologies nous nous sommes énormément intéressés à tout ce qui est lié à l’intégration des systèmes d'informations, à l’économie numérique et aux risques cyber. Nous avons donc développé tout un pan dédié à l’économie des nouvelles technologies. J’ai toujours exercé à Lyon, où je me suis installée directement en revenant des États-Unis.
A.P. : Qu’est-ce qui départage ce cabinet de ses nombreux concurrents ?
A. D-F : Je dirais que c’est avant tout son approche pluridisciplinaire. Même si beaucoup de cabinets ont une telle approche aujourd'hui, certains redeviennent ce qu'on appelle des cabinets de niche. Pour nous, il a toujours été important de garder la pluridisciplinarité pour être en capacité d'avoir une approche transversale sur les dossiers. Notre compétence, justement, se trouve dans notre capacité à se mettre en réseau et à travailler en mode projet, en réunissant diverses expertises, internes comme externes, au service de nos clients.
« Pour nous, il est vraiment important d'être un acteur de la cité, c’est une manière de rendre pour partie ce que nous avons reçu et de mettre en valeur le rôle de l'avocat en tant qu'acteur sociétal »
Nous avons vraiment pour ambition de développer un regard à 360° au profit de nos clients et d'intégrer des expertises qui ne sont pas forcément représentées au sein du cabinet, des compétences juridiques mais pas que. Nous avons notamment un partenariat avec une entreprise spécialisée en cybersécurité. En fait, nous allons chercher l'expertise là où elle est, que ce soit chez des professionnels du chiffre ou des notaires, afin de devenir l’allié stratégique du dirigeant d’entreprise et de son équipe. C’est sûrement peut être aussi ce qui nous distingue auprès de notre cycle de clientèle, principalement PME et ETI : la proximité avec le dirigeant et son équipe.
A.P. : Vu que vous êtes intéressés par la pluridisciplinarité, avez-vous discuté en interne de la possibilité d'adopter le nouveau statut de société pluriprofessionnel d'exercice (SPE) ?
A. D-F : Nous en avons effectivement discuté. Après investigation, nous nous sommes dit que nous n’en avions pas forcément besoin à ce jour. C’est comme pour un réseau international : nous pouvons soit le rejoindre de manière intégrée ou bien en partenariat avec des membres différents en fonction des pays. Pour le moment, nous avons plutôt choisi cette dernière option, celle des cabinets partenaires plutôt que des cabinets intégrés, pour ne pas être économiquement incités à faire toujours travailler les personnes « membres » de la même société que nous. Nous souhaitons garder le choix d’avoir recours à un large panel de partenaires pour pouvoir s’adapter à tous les besoins de nos clients. Mais aucune porte n’est fermée.
A.P. : Avez-vous opté pour une nouvelle stratégie ou bien des ambitions de développement à l'international ?
A. D-F : Oui, à Paris surtout, où depuis maintenant 3 ans Arnaud Lafarge nous a rejoint après un parcours chez DLA Piper pour développer nos compétences en fusion-acquisition et private equity. Nous venons également de nommer Hélène Relange comme senior manager de l'équipe fiscale à Paris dans l’idée de booster notre développement sur le marché parisien.
A.P. : Face aux effets de la crise et aux défaillances d'entreprises qui commencent à arriver avez-vous mis le paquet sur tout ce qui est en procédure collective ou même cessions et transmissions ?
A. D-F : Notre équipe fusion-acquisition a été initialement fortement impactée, surtout au début de la crise Covid, mais a pu finalement retrouver une activité presque normale dès le second semestre 2020, notamment avec le dynamisme des entreprises ‘Covid resilient’.
Et bien évidemment, côté procédures collectives. L’une des dernières choses que nous avons fait en quittant nos locaux le 16 mars 2020 était de suivre une formation ‘restructuring de premier niveau’ afin d’être tous en capacité de donner des éléments de réponse à nos clients sur les procédures de mandat ad hoc, de sauvegarde ou de conciliation sans avoir à trop solliciter notre équipe restructuring dirigée par Édouard Bertrand que nous imaginions être sur-sollicitée. Mais finalement le nombre de défaillances d'entreprises est historiquement bas. Nous sommes sur le pied de guerre même si la déferlante n'a pas encore commencé.