Mobilisée depuis des mois pour restaurer le secret professionnel de la défense et du conseil, la profession d’avocat était montée au créneau la semaine dernière en voyant qu'au fil de la navette parlementaire l'article concernant la protection de leur secret inscrit dans le projet de loi Confiance dans l’institution judiciaire avait été considérablement raboté.
Jeudi 21 octobre, la Commission mixte paritaire (CMP) a en effet trouvé un accord fixant des limites à la protection du secret professionnel en matière d'enquête et d'instruction pour des affaires de fraude fiscale, de corruption, de trafic d’influences et de blanchiment, au grand dam des avocats.
Le CNB a d’ailleurs immédiatement dénoncé ce compromis « incompréhensible et dangereux » qu'il juge même « totalement inacceptable » car il crée un « état d’insécurité juridique permanent préjudiciable aux citoyens, aux entreprises, aux avocats et à l’Etat de droit ».
Après avoir été convié à en discuter par le garde des Sceaux en personne lundi 25 octobre, et après consultation du bureau du CNB, Jérôme Gavaudan, son président a mandaté un groupe de travail d’experts coordonné par Laurence Roques et Mathieu Boissavy, présidente et vice-président de la commission Libertés et Droits de l’Homme du CNB, auquel Vincent Nioré a accepté de participer, afin « d’élaborer dans les plus brefs délais une proposition modificative du texte issu de la CMP permettant de garantir la protection absolue du secret ».
Voici la proposition modificative du texte votée par le CNB :
"Article 3
Le code de procédure pénale est ainsi modifié :
2° bis Après le même article 56-1, sont insérés deux articles 56-1-1 et 56-1-2 ainsi rédigés :
« Art. 56-1-1. – Lorsque, à l’occasion d’une perquisition dans un lieu autre que ceux mentionnés à l’article 56-1, il est découvert un document mentionné au deuxième alinéa du même article 56-1, la personne chez qui il est procédé à ces opérations peut s’opposer à la saisie de ce document. Le document doit alors être placé sous scellé fermé et faire l’objet d’un procès-verbal distinct de celui prévu à l’article 57. Ce procès-verbal ainsi que le document placé sous scellé fermé sont transmis sans délai au juge des libertés et de la détention, avec l’original ou une copie du dossier de la procédure.
Les quatrièmes à neuvième alinéas de l’article 56-1 sont alors applicables.
« Art. 56-1-2. – Sans préjudice des prérogatives du bâtonnier ou de son délégué prévues à l’article 56-1 et de celles de la personne perquisitionnée prévues à l’articleDans les cas prévus par les articles 56-1 et 56-1-1, le secret professionnel du conseil garanti par l’article préliminairen’est pas opposable aux mesures d'enquête ou d’instruction :
1° lorsque celles-ci sont relatives aux infractions mentionnées aux articles 1741 et 1743 du code général des impôts et aux articles 421-2-2, 433-1, 433-2 et 435-1 à 435-10 du code pénal ainsi qu’au blanchiment de ces délits etsous réserve que les consultations, correspondances ou pièces, détenues ou transmises par l'avocat ou son client établissent de manière intrinsèque la preuve de leur utilisation par l’avocat aux fins de commettre ou de faciliter sciemment la commission desdites infractions.
2° ou lorsque l’avocat a fait l’objet de manœuvres ou actions aux fins de permettre, de façon non intentionnelle, la commission ou, la poursuite ou la dissimulation d’une infraction. »
6° bis Le troisième alinéa de l’article 100-5 est complété par les mots : « et couvertes par le secret professionnel de la défense et du conseil, prévu à l’article 66-5 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques., hors les cas prévus à l’article 56-1-2 » ;"