AccueilDroitActualité du droitLaëtitia Marchand et Matthieu Hy, engagés pour défendre les avocats
Élections du Conseil de l’Ordre du barreau de Paris

Laëtitia Marchand et Matthieu Hy, engagés pour défendre les avocats

Leatitia Marchand et Matthieu Hy sont avocats au barreau de Paris. Tous deux sont candidats aux élections du Conseil de l’Ordre, avec l’ambition première de s’investir dans tous les aspects de l’exercice.
Laëtitia Marchand et Matthieu Hy, engagés pour défendre les avocats
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DroitActualité du droit Publié le , Propos recueillis par Boris Stoykov

Affiches Parisiennes : Vous vous présentez en binôme aux élections du Conseil de l'Ordre. Pourriez-vous vous présenter et nous dire ce que vous faites exactement ?

Laetitia Marchand : Je suis avocate au barreau de Paris depuis mars 2011. J'exerce principalement en contentieux pénal et social. J'ai été collaboratrice, je me suis installée avant de rejoindre un cabinet groupé. Aujourd’hui, une AARPI est en cours de finalisation.

Dès l'école d'avocats, je suis entrée à l'Union des jeunes avocats, dont j'ai été présidente en 2017/2018. J’ai été chargée d’enseignement à l’Université (UPEC) durant près de sept ans, en droit pénal et procédure pénale. Depuis la dernière rentrée scolaire, je continue uniquement à participer aux enseignements de l’EFB, en droit pénal et en droit du travail et à l’Enadep. Aujourd’hui, nous présentons avec Matthieu une candidature indépendante, et ce, avec l'intention de prolonger les principes que j'ai pu défendre et, au-delà, présenter aussi autre chose. Nous avons plus de 40 ans et plus de dix ans de barre, nos structures sont établies et nous avons rencontré de nouvelles problématiques.

Matthieu Hy : J’ai prêté serment en novembre 2009, j'ai été collaborateur les premières années avant de m'installer en libéral et j'ai été secrétaire de la Conférence en 2011, ce qui a été ma première approche de l'institution ordinale. J'ai été à l’UJA sur un aspect plutôt plus ludique et récréatif, puisque j’ai été deux fois directeur de la Revue. Je suis spécialiste en droit pénal, j'interviens exclusivement dans cette matière et plus particulièrement dans la branche du droit des saisies pénales et des confiscations.

Je fais beaucoup d'enseignement, j’en ai fait à l’EFB et maintenant, je suis dans une prépa privée à l'entrée au CRFPA. Et cette année, je deviens enseignant en Master 2 de droit pénal des affaires et de la conformité à l'Université de Nanterre où j’enseignerai le droit des saisies.

A.- P. : Comment avez-vous constitué votre binôme et décidé de vous présenter ?

M. H. : On n'a pas eu besoin de constituer le binôme, car on exerce ensemble, donc effectivement, ça s'est fait de manière plus que naturelle. Ce sont nos deux volontés de se présenter cette année qui se sont rencontrées. La question, c'est pourquoi maintenant ? Parce que dans le parcours de Laëtitia et dans le mien, on estime qu’on n'est plus tout à fait des jeunes avocats, mais on n’est pas encore des avocats extrêmement expérimentés. On est à un moment où on est encore capable de comprendre les problématiques des collaborateurs, où on est tout à fait capable de comprendre celles de ceux qui s'installent et on est déjà en train de découvrir les problématiques de structures et de patrons. J’ai un collaborateur qui est arrivé depuis quelques jours donc je découvre ce que c'est d'avoir un collaborateur à mes côtés. C'est le moment d’être capable d'avoir un regard sur les problématiques de toutes les étapes de la vie d'avocat.

L. M. : C'est aussi le moment, parce qu’il faut avoir la capacité de s'organiser, de gérer financièrement son cabinet. Être membre du Conseil de l’Ordre va nous demander du temps. Il faut connaître une certaine stabilité pour se permettre d'avoir cet engagement bénévole quotidien, qui va durer trois ans et qui peut conduire à effectuer beaucoup d'heures de travail.

A.- P. : A travers vos parcours respectifs, vous vous sentez particulièrement investis auprès de vos confrères et consœurs ?

M. H. : La Conférence ou la Revue de l’UJA sont un investissement différent, mais effectivement, le mandat de membre du Conseil de l'Ordre est une nouvelle façon de s’investir au sein du barreau, qui nous paraît d'autant plus importante qu’on est avocat en contentieux tous les deux. Nous avons une vie de palais intense, on sait ce que cela signifie et nous avons réellement conscience que les avocats constituent une famille.

A.- P. : Comment analysez-vous l’absence d’égalité entre les associés hommes et les associées femmes. Y a-t-il un plafond de verre à briser ?

L. M. : Aujourd'hui, la profession est constituée par une majorité de femmes. Cependant, il y a toujours moins de femmes associées et une différence de revenus est souvent constatée. Je crois qu'il faut continuer le changement entrepris et former dès l'école. Il ne faut pas rester dans une vision trop traditionnelle de la profession, car plus on va pousser et éduquer à l'égalité, plus elle sera réelle. La parole s’est libérée aussi, ce qui n’est pas sans incidence. Cela fait quand même plusieurs années que les institutions se sont saisies de la chose. Preuve en est la création de commissions égalité.

M. H. : L'idée est surtout d'accompagner un mouvement qui existe déjà, parce que les jeunes avocats sont très conscients de ça. On est une profession en retard par rapport aux autres, mais on essaie de le rattraper sur tout ce qui est sexisme, discrimination et toutes les formes de plafond de verre, qui peut aussi bien concerner les femmes que le milieu social dont on vient.

A.- P. : Le prochain bâtonnier sera d’ailleurs une femme. Comment allez-vous vous inscrire dans ce Conseil de l'Ordre si vous êtes élus et quelles tâches souhaiteriez-vous effectuer auprès de la bâtonnière et du vice-bâtonnier ?

M. H. : Laëtitia et moi ne voulons pas forcément nous investir dans les mêmes choses. Il y a des passages obligés, comme la déontologie, mais moi, ce qui m'intéresse c'est évidemment l'aspect pénal, donc les relations avec les magistrats, la défense du secret professionnel, et l'aspect formation, parce que le droit est devenu tellement complexe qu'on ne peut pas se permettre de ne pas être formé et qu’on ne peut plus se permettre d'être généraliste. Il y a encore des efforts à faire et ce n'est pas un sujet qui doit être laissé au CNB. L'Ordre des avocats de Paris doit s’en saisir.

L. M. : Si nous sommes élus, je souhaiterais participer à la formation administrative, qui accompagne les avocats en difficulté (ceux notamment qui ont manqué de payer leurs cotisations). Il est temps de trouver des solutions, des échéanciers par exemple, avant d'arriver à la pire des situations où il n’est plus possible de les rétablir. M’occuper un peu, en quelque sorte, de la vie de l’avocat.

Je souhaiterais également traiter de sujets comme la lutte contre la souffrance au travail. Peu importe le niveau d'exercice de la profession, il est nécessaire de réussir à trouver des solutions face à une telle souffrance, qu’elle soit vécue par des collaborateurs ou des associés. Il y a une espèce de tabou sur comment cela se passe parfois et personne n'ose donc en parler. L’Ordre doit être saisi.

A.- P. : Avez-vous l’impression que, depuis la crise sanitaire, les avocats ont plus de difficultés qu'avant ?

M. H. : D’un point de vue chiffré, scientifique et technique, je n'en sais rien. Si on parle de sentiments, je suis très mitigé parce qu'il y a beaucoup de cabinets dont j'ai l'impression qu'il n'y a eu aucun problème, j'ai des échos de cabinets qui ont augmenté leur chiffre d'affaires l'année dernière sans aucune difficulté. Et puis d'autres peut-être, pour lesquels ça a été plus difficile et pour lesquels les difficultés vont peut-être se prolonger. Ça n’a pas forcément précipité des fermetures de cabinets, mais plutôt des départs à la retraite.

L. M. : Les actions ont été faites pour permettre aux avocats de rester autant que possible, au moins en statu quo, les deux premiers mois où l’on s'est retrouvé du jour au lendemain sans rien. Mais il n’est pas possible de savoir exactement et réellement aujourd'hui l'impact de la crise. Cela va sans doute être plus possible à présent. En revanche, il est certain que cette période a conduit à rompre des périodes d’essai de collaborateurs, ces derniers étant devenus de fait une sorte de variable d'ajustement.

A.- P. : Maintenant votre profession de foi faite, quels sont les principaux éléments que vous souhaitez mettre en avant pour inciter vos confrères et consœurs à voter pour vous ?

M. H. : Il y a cinq thèmes que nous défendons dont la promotion d'une déontologie modernisée, parce qu’il nous semble que les procédures en matière de déontologie doivent s'adapter notamment aux réseaux sociaux et permettre des réactions quasi instantanées lorsqu'un confrère dérape. Également, la promotion de la formation et des nouvelles technologies comme outil de développement, une façon de développer et de développer son activité. Il y a le soutien aux avocats en difficulté, la défense des droits de la défense et du secret de l'avocat.

L. M. : Nous défendons le secret professionnel : nous souhaitons rester avocat de plein exercice avec des principes déontologiques et un vrai secret qui ne soit pas complètement battu en brèche. Les droits de la défense sont un principe essentiel de la justice. Il convient de défendre nos moyens d'exercer et d'assurer à chacun l'accès à une justice équitable.

M. H. : Les droits de la défense, c'est une violence que l'Etat se fait à lui-même. Il limite sa propre efficacité répressive en donnant aux justiciables une chance de s'en sortir, alors même qu'on pourrait trouver la preuve de leur culpabilité si on écoutait les conversations avec leur avocat ou si on allait perquisitionner le cabinet. L'Etat a de plus en plus de mal à supporter l'idée même de droits de la défense, comme l'idée même du secret. La volonté de l'efficacité répressive est tellement en train de prendre le dessus que l'Etat supporte de plus en plus mal la chance qui est censée être laissée aux justiciables de gagner contre lui, ce qui est la définition même des droits de la défense.

A.- P. : Dans un dossier en appel, que dites-vous à un juge qui ne vous donne que très peu de temps pour plaider un dossier complexe ?

L. M. : J’indique toujours que je plaiderai le temps nécessaire.

Il m’est arrivé d’attendre cinq heures avant de plaider et une fois mon dossier appelé, il m’a été demandé de plaider en cinq minutes. Je m’y refuse. Je veux travailler correctement et exercer pleinement ma profession.

M. H. : C'est surtout un problème financier pour la justice. C’est une question d'offres et de demandes. Je me suis déjà retrouvé à une audience correctionnelle, en matière de droit de la presse, où les magistrats ont renvoyé à une date très lointaine et l'un des assesseurs a dit à mon contradicteur que pour aller plus vite, il y avait la voie civile. Il y a une offre, il faut que la demande colle à l'offre et c'est à nous de nous ajuster, ce qui n’est pas acceptable. Pour lutter efficacement contre ce problème, je ne crois pas que ça doit se passer au niveau de l'Ordre, mais plutôt au niveau du ministère ou même à un niveau supérieur. Tout ça est surtout une question d'argent.

L. M. : L'idée est d'élaborer quelque chose de constructif. Il faut réussir à travailler ensemble, dans certaines matières, c’est déjà un peu entamé, mais il va falloir recréer un dialogue avec tout le personnel de justice. Et la création du tribunal, où on ne peut pas aller partout, n'a pas forcément beaucoup aidé.

M. H. : La proximité est avant tout physique et l'architecture du nouveau Palais nous a coupé des magistrats. Il y a des portes, des codes. Les magistrats ne nous voient plus. Ils ont leurs propres couloirs pour arriver dans les salles d'audience. Dans l'ancien palais, ils arrivaient par les mêmes couloirs que nous. Ce sont ces petites discussions informelles qui mettent de l'huile dans les rouages de la justice. Je pense aussi que ça favorise des bons jugements. Quand un juge passait par le plateau correctionnel de l’ancien palais, il croisait, par exemple, les familles des prévenus. Je pense qu'il juge différemment lorsqu’il arrive par son couloir ultra sécurisé et qu'il n'a jamais l'occasion de croiser un avocat, ni à la machine à café ni dans un couloir.

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