Créée par la loi du 15 août 2014 relative à l'individualisation des peines et renforçant l'efficacité des sanctions pénales, la contrainte pénale a vocation à permettre un suivi renforcé, individualisé et évolutif, de la personne condamnée. Cette peine vise à favoriser la désistance – désignant l'arrêt d'un parcours de délinquance ou de criminalité – de la personne condamnée, par la personnalisation de la sanction pénale, dont le contenu est déterminé après une évaluation appronfondie de la situation du condamné, et par un suivi évolutif, renforcé et pluridisciplinaire.
Depuis le 1er janvier 2017 la contrainte pénale peut donc être prononcée pour tout délit dans lequel une peine de prison est encourue (article 131-4-1 du code pénal). Elle a vocation à être prononcée dans les hypothèses où « la personnalité et la situation matérielle, familiale et sociale de l'auteur, ainsi que des faits de l'espèce, justifient un accompagnement socio-éducatif individualisé et renforcé ».
Le choix de cette peine vient d'une analyse des risques de récidive, des besoins de la personne condamnée et de sa capacité à s'engager dans un processus d'accompagnement. La contrainte pénale est envisagée pour les individus présentant des problématiques lourdes (santé, emploi, logement…), qui exigent un accompagnement serré et pluridisciplinaire.
Le fonctionnement
La juridiction de jugement qui prononce la contrainte pénale définit la durée de cette peine (entre six mois et cinq ans) et la peine de prison qui peut être prononcée en cas de non-respect des obligations (deux ans maximum). Elle peut également définir des obligations et interdictions particulières, mais uniquement si elle dispose d'éléments suffisants sur la personnalité et la situation du condamné. Ces obligations sont notifiées à la personne condamnée à l'issue de l'audience.
Dans les trois mois suivants le prononcé d'une contrainte pénale, la situation de la personne condamnée fait l'objet d'une évaluation par le service pénitentiaire d'insertion et de probation (SPIP). Cette évaluation est marquée par des entretiens réguliers (quatre au minimum), parfois avec un psychologue ou un autre intervenant, et des contacts avec les partenaires ayant pu accompagner la personne. La famille du condamné peut être rencontrée afin de mieux connaître le mode de vie de l'intéressé. Chaque dossier est ensuite examiné en commission pluridisciplinaire.
Le juge d'application des peines
À l'issue de cette évaluation, un rapport complet est adressé au juge de l'application des peines (JAP), magistrat chargé du suivi de la contrainte pénale. Ce rapport comporte une analyse de sa situation du condamné et des propositions relatives au contenu de la contrainte pénale.
Sur cette base, après avoir reçu la personne condamnée pour recueillir ses observations, le JAP prononce les obligations et interdictions contenues dans la contrainte pénale. Le JAP peut également décider de modifier les obligations et interdictions prononcées par la juridiction de jugement.
Une fois que le JAP a fixé le contenu de la mesure, le suivi se met en place. De nouvelles évaluations sont effectuées régulièrement et matérialisées, au moins une fois par an, par un rapport adressé au JAP.
Pour cela, le SPIP peut procéder à des entretiens individuels (au minimum mensuels), permettre l'orientation prioritaire dans certains programmes ou stages (groupes de parole, programmes d'insertion…), rencontrer la famille de la personne, faire des visites à domicile…
En matière de contrainte pénale, le JAP est véritablement un juge du suivi de la mesure (alors que dans le cadre d'un sursis avec mise à l'épreuve, il ne rencontre pas nécessairement les personnes en l'absence d'incident). Il est destinataire des rapports du SPIP, peut recevoir la personne condamnée, et peut modifier à tout moment les obligations et interdictions applicables.
En cas d'incident
Le SPIP vérifie que les obligations et interdictions sont respectées. En cas d'incident il en informe le JAP qui peut :
- décider d'un rappel au condamné des mesures, obligations et interdictions auxquelles il est astreint ;
- modifier l'intensité du suivi et les obligations/interdictions ;
- si ces deux réponses se révèlent insuffisantes, le JAP peut saisir un autre magistrat afin que soit mis à exécution tout ou partie de la peine d'emprisonnement encourue qui avait été fixée par la juridiction de condamnation.
Si la durée de l'emprisonnement alors ordonné est égale à la durée maximale fixée par la juridiction de condamnation, il est mis fin à la contrainte pénale.
La contrainte pénale en chiffres
Au 30 novembre dernier, 2 503 contraintes pénales avaient été prononcées par les juridictions. Leur nombre a progressé de 32 % sur les neuf premiers mois de l'année 2016 par rapport à la même période de 2015. La contrainte pénale a été prononcée par les juridictions majoritairement pour du contentieux routier (35 %), des faits de violences (33 %), puis des vols (19 %) et des usages de stupéfiants (8 %). Pour mettre en place cette contrainte pénale, 761 postes ont été créés. Les personnels ont été recrutés et formés pour étoffer les équipes pluridisciplinaires des SPIP de 2014 à 2016. En outre, 168 autres prendront leur poste en 2017, et 71 en 2018.