La crise économique, à travers les données du printemps, reste incomplète. Certaines évolutions restent paradoxales. Le taux de chômage francilien a retrouvé son niveau d'avant la récession de 2008-2009, mais sa baisse est liée à la non-disponibilité, du fait du confinement jusqu'à la mi-mai, des personnes sans emploi. De même, le nombre de défaillances d'entreprises est au plus bas depuis le printemps 1993, mais le repli est lié à la fermeture de la plupart des tribunaux de commerce pendant le confinement.
Pour le Crocis, il convient aussi de retenir que plus de 160 000 emplois ont été détruits en Ile-de-France au cours du premier semestre 2020, que les commercialisations de bureaux se sont réduites de 65 % dans la région au deuxième trimestre et que le nombre de passagers à Roissy et à Orly ne s'est élevé qu'à un million d'avril à juin contre 28,6 millions à la même période en 2019.
Au niveau national, après s'être déjà contracté de 5,9 % au trimestre précédent, le PIB hexagonal a chuté de 13,8 % au deuxième trimestre 2020. Pour fin 2020, l'Insee s'attend à un rebond de 16 % au troisième trimestre avant que le PIB ne se stabilise au dernier trimestre ; ainsi, sur l'ensemble de 2020, le PIB français devrait diminuer de 9 % par rapport à 2019.
160 000 emplois détruits
Dans ce contexte tout aussi sombre qu'inédit, malgré les mesures de chômage partiel, près de 160 000 emplois salariés privés ont été détruits au deuxième trimestre 2020, après plus de
490 000 en début d'année. Parallèlement, le nombre de demandeurs d'emploi en fin de mois en catégorie A a dépassé le cap des 4,0 millions au cours du printemps et le taux de chômage devrait ressortir en fin d'année entre 9,5 % et 10 %.
Restée quasiment à l'arrêt tant que les mesures sanitaires de confinement ont été appliquées, l'économie francilienne a ensuite redémarré, mais le rebond est encore partiel aujourd'hui, voire inexistant dans certains secteurs, du fait du manque de visibilité entretenu par l'évolution de l'épidémie de Covid-19. Ainsi, dans l'industrie manufacturière, la fabrication de matériels de transport, notamment, est toujours en grande difficulté ; dans les services marchands, l'hôtellerie-restauration et, plus globalement, le tourisme affichent des perspectives plus qu'incertaines. Dans le commerce, les soldes d'été ont été décevants. Dans le BTP, les entreprises de travaux publics sont très réservées quant à leur activité des prochains mois. Quelques données relatives à l'été 2020 sont disponibles et illustrent la difficulté de la reprise économique : la demande placée de bureaux en Ile-de-France a de nouveau été cantonnée sous les 250 000 m2 sur l'ensemble du troisième trimestre et le trafic de Paris Aéroport a accusé des replis d'encore 77,1 % en juillet et 68,8 % en août.
Surfaces de bureaux commercialisés
Après avoir calé dès le premier trimestre 2020, la demande placée de bureaux en Ile-de-France a encore nettement décéléré au deuxième trimestre ; ainsi, les commercialisations de bureaux dans la région se sont élevées à seulement 200 200 m2, soit un repli de 65 % par rapport au deuxième trimestre 2019. Par conséquent, la demande placée cumulée sur les douze derniers mois (i.e. de juillet 2019 à juin 2020) a été cantonnée à
1 933 800 m2, soit son niveau le plus bas depuis fin 2013 – début 2014. Aucune surface n'a été épargnée par la baisse, malgré les 126 000 m2 pris à bail par Total dans “The Link” à La Défense. Sans surprise, les résultats les plus récents montrent que la demande placée a peiné à dépasser les 200 000 m2 dans la région au troisième trimestre 2020.
Défaillances d'entreprise
Le nombre de défaillances d'entreprise en Ile-de-France est resté orienté à la baisse au deuxième trimestre 2020 ; ainsi, le volume des défaillances dans la région a diminué de 60,3 % par rapport à la même période de 2019 et, en cumul sur les 12 derniers mois, est au plus bas depuis le printemps 1993. Cette chute des défaillances a été tout aussi marquée au plan national (- 55,4 % en glissement annuel au deuxième trimestre 2020). Toutefois, même si un certain nombre d'audiences ont pu être maintenues par voie dématérialisée, l'ampleur du repli est en grande partie liée aux retards des jugements pendant la période de confinement (du 17 mars au 11 mai 2020) ; compte tenu des difficultés économiques provoquées par la crise sanitaire, il est fort probable que la tendance s'inverse avant la fin de 2020 et donne une image plus réaliste de la situation.
Créations d'entreprise
Quelque 48 000 entreprises ont été créées en Ile-de-France au deuxième trimestre 2020. Ce volume a représenté une nouvelle baisse (- 18,8 % par rapport au deuxième trimestre 2019) après celle déjà enregistrée au trimestre précédent (- 8,1 %). Contrairement au premier trimestre, le repli du printemps concerne à la fois les créations sous le régime du micro-entrepreneur (- 14,6 % après - 16,8 %) et les créations “classiques” (- 24,3 % après + 2,7 %). Au plan national, l'ampleur de la décélération du volume total de créations d'entreprises a été équivalente à celle observée en Ile-de-France (- 18,1 % en glissement annuel). Les informations les plus récentes montrent que, depuis la sortie du confinement, le volume total des créations est reparti à la hausse en Ile-de-France (+ 25,4 % sur un an en août dernier, notamment).