Le gouvernement a décidé, soudainement, de réformer les professions réglementées, accusées par le Ministre de l’Economie alors en fonction de « capter par leur position des revenus à la population pour des services payés trop chers qui entament le pouvoir d’achat des ménages ». Les avocats, notamment, étaient visés.
Une telle affirmation est scandaleuse. La réglementation des professions n’est pas une source de privilèges mais une sécurité pour les clients ; telle en est la justification et la réalité. Les professions réglementées assurent, par ailleurs, l’effectivité et la continuité de services publics essentiels, comme la Justice, alors que l’État ne cesse au contraire de se désengager, ainsi en matière d’aide juridictionnelle, manquant à ses devoirs fondamentaux.
La profession d’avocat est, en outre, une profession ouverte, objet d’une vive concurrence, tant interne qu’externe, et ne bénéficie donc d’aucun marché fermé qui conduirait à une quelconque « captation ».
Par ailleurs, la méthode employée par le gouvernement, qui impose un rythme empêchant toute réelle concertation, est d’autant moins acceptable que les réformes proposées concernant les avocats sont de potentielles opportunités méritant d’être étudiées dans la sérénité.
La suppression de la territorialité de la postulation ne doit évidemment pas conduire à une désertification et une disparition de la justice de proximité. L’ACE avait déjà proposé que la postulation soit réorganisée au niveau des cours d’appel et que soit instituée une représentation obligatoire devant les juridictions commerciales, afin qu’aucun justiciable ne se trouve seul devant ses juges, au moins pour les affaires les plus importantes.
Concernant l’ouverture du capital des cabinets d’avocats, l’ACE rappelle son opposition ferme aux alternative business structures. Nul ne saurait accepter qu’une banque ou un supermarché s’offre un avocat pour en faire un produit de grande consommation.
L’ACE a en revanche toujours été favorable à une ouverture minoritaire et contrôlée du capital, qui permettrait par exemple aux jeunes avocats de bénéficier du soutien des membres de leur famille, ou à des cabinets de se structurer dans la pérennité pour se développer, voire s’exporter, sans s’alourdir d’un emprunt.
Concernant, enfin, l’avocat en entreprise, l’ACE considère qu’il s’agit d’une véritable opportunité pour la profession : les jeunes avocats bénéficieront de carrières diversifiées, évolutives, cela rapprochera les avocats des entreprises et renforcera la sécurité de celles-ci en y pérennisant la place du droit, ce qui est un levier de croissance.
L’ACE demande au gouvernement d’engager une véritable concertation afin que le Conseil national des barreaux puisse réellement être en mesure de s’assurer que la mise en œuvre de ces réformes sera respectueuse des principes essentiels de la profession, au service de l’intérêt général.
William Feugère, Président National
Paris, le 26 septembre 2014