Adoptant des points de vue tout à fait différents, les deux intervenants ont expliqué pourquoi nos neurones ont encore un avenir face à la machine, par la coopération et le sens.
Pour celui qui s'auto-qualifie d'« anthropologue évolutioniste », les humains ont inventé une coévolution avec les machines. Cela pose de véritables questions juridiques sur l'éthique, l'encadrement et la transparence. « Il n'y a jamais eu autant de comités d'éthique, ce n'est pas pour rien ! », s'exclame le professeur.
Nous vivons ainsi dans une « période de changements extrêmement rapide », au sein d'un « processus de variation et de selection ». Des personnes peuvent ainsi bousculer très rapidement un espace économique et social en créant des produits et services « ne correspondant pas du tout à un besoin de la société » mais qui changent le monde.
« Nous sommes sur des algorithmes de l'évolution », explique Pascal Picq.
Pour ce scientifique, il faut être en avance sur l'étude animale et sociologique pour développer des algorithmes et des robots dans un espace digital darwinien. « En France, nous sommes très mauvais sur l'éthnologie », déplore-t-il, contrairement à la Chine et au Japon, en avance dans ces matières. « L'interdisciplinarité va être très importante car ce n'est pas que technique, il s'agit d'un phénomène d'évolution ».
L'IA sert à mettre en évidence des corrélations qu'on passerait beaucoup de temps à faire, « donc, c'est simplement une aide, une intelligence humaine augmentée », résume Pascal Picq.
Tout aussi optimiste, Denis Jacquet, mène une réflexion sur l'utilisation de « ces outils incroyables », mais soulève le risque qu'ils nous dépassent et deviennent plus intelligents que l'humain.
Une crainte universelle. « Quelque chose d'inquiétant et d'incontrôlable », selon lui.
Mal utilisée, l'IA pourrait finalement se révéler contre-productive. Les nouvelles technologies ont déjà un impact sur l'évolution cognitive des enfants, alerte-il.
L'entrepreneur est toutefois convaincu de l'utilité sociale de l'IA et de la révolution qu'elle entraînera dans le monde du travail. En écho au processus schumpeterien de destruction créatrice, il n'a pas d'inquiétude sur « notre capacité de résilience folle » pour « la révolution des emplois » à venir.
Denis Jacquet n'a pas d'inquiétude sur « notre capacité de résilience folle » pour « la révolution des emplois » à venir.
De fait, selon un sondage réalisé par CapGemini, 63 % des entreprises n'ont pas supprimé de postes du fait de l'adoption de solution d'IA.
Cependant, Denis Jacquet regrette le manque de moyen alloué au développement de l'IA. L'Europe a lancé un plan de 9 milliards d'euros dans l'IA « pour sauver le monde », c'est ce qu'investit la Chine en 3 mois. L'expert estime que l'effort français pris suite au rapport Villani est tout aussi ridicule.