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Guillaume Toublanc : L'avenir du digital Européen, c'est la Deep Tech

EIT Digital (Institut européen d'innovation et de technologie Digital eitdigital.eu) est un organisme indépendant de l'UE dont la mission consiste à renforcer la capacité de l'Europe et ses entreprises en matière d'innovation digitale et d'éducation entrepreneuriale. Guillaume Toublanc pilote l'activité en France d'EIT Digital, il nous parle de la transformation numérique en France et des enjeux à venir.
Guillaume Toublanc : L'avenir du digital Européen, c'est la Deep Tech
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Affiches Parisiennes : Vous êtes le directeur France d'EIT Digital, pouvez-vous nous présenter votre organisme et son activité ?

Guillaume Toublanc : L'EIT Digital est un organisme qui dépend de l'Union européenne. L'EIT Digital a été fondé en 2010 à l'initiative de José Manuel Barroso. Sa mission, est de faciliter l'essor des startups et scaleups à vocation digitale en Europe, de faciliter l'accès de la recherche au marché et d'encourager l'éducation entrepreneuriale.

Concrètement, comment opère EIT Digital sur ces trois activités.

La première activité est un accélérateur de scaleups. C'est-à-dire de jeunes startups qui atteignent leur premier million d'euros de chiffre d'affaires, qui ont trouvé un marché dans leur pays et qui cherchent à se développer au niveau international, notamment européen. Nous les accompagnons sur une durée d'un an, nous les aidons à trouver des clients et à lever des fonds. Aujourd'hui et depuis notre création, ce sont près de 400 sociétés qui ont bénéficié de notre accompagnement, pour des levées de fonds d'environ 100 millions d'euros. Ces entreprises ont levé, par elles-mêmes, un peu moins d'un milliard d'euros.

Notre deuxième activité est ce que l'on appelle l'INNOVATION FACTORY dont l'objectif est de faire sortir la recherche dite « tech », scientifique, du laboratoire pour l'amener sur le marché. Chaque année, avec nos partenaires, nous lançons une cinquantaine d'innovations qui donnent lieu à la génération de nouveaux produits et services digitaux chez des acteurs industriels issus de notre écosystème.

La troisième activité est la formation, puisque pour innover, il faut avoir des talents. Nous avons ainsi noué des partenariats avec une vingtaine d'universités européennes leaders dans le domaine de la tech afin de favoriser l'éducation entrepreneuriale et offrir des programmes alliant technologie et business, répondant ainsi aux futurs besoins du marché et des étudiants. Ces programmes développés en master, doctorat mais aussi en formation continue accueillent environ 1 000 étudiants qui sont formés chaque année dans cet écosystème. Nos étudiants vont se former aux enjeux technologiques de la cybersécurité, de la data science, des systèmes embarqués et autonomes etc.

Ils reçoivent également une formation en innovation entrepreneuriale pour apprendre à devenir « entrepreneur » et créer leur propre start-up.

Pour mener à bien nos activités, nous nous appuyons sur un écosystème de 300 partenaires avec lesquels nous co-investissons. Ils sont à la fois de grandes entreprises, des PME, des startups mais aussi des instituts de recherche publics ou des grandes universités de la tech françaises et européennes.

Par ailleurs, s'agissant des PME, nous avons un programme de doctorat industriel qui permet à ces mêmes PME d'avoir accès aux meilleurs chercheurs européens en Intelligence artificielle, en cybersecurité ou encore en robotique etc…

A.- P. : Comment organisez-vous votre activité depuis la crise sanitaire ?

G. T. : Nous avons constaté que la crise a accéléré un besoin de digitalisation, notamment pour les PME. Nous avons tous été en télétravail, nous avons tous acheté en ligne, nous avons tous été confronté à de nouvelles problématiques de santé, à des problématiques de financement des entreprises, s'agissant surtout du monde d'après. L'EIT Digital est au cœur de toutes les nouvelles problématiques qui ont émergé puisque nous sommes une forme d'accélérateur d'innovation pour les entreprises, et en particulier pour les PME. A titre d'exemple, l'année dernière, nous avons lancé un projet autour de la livraison du « dernier kilomètre » par un robot, ce que l'on appelle Last Mile Autonomous Delivery, (LMAD) que nous avons expérimenté sept mois après la naissance de ce projet, avec deux robots qui tournent à Helsinki et à Paris Saclay sur le site industriel de Nokia. Cela s'est fait grâce à différents partenaires qui ont amené différentes briques, les logiciels nécessaires, les robots indispensables et d'autres pôles de compétitivité qui nous ont ouvert un lien avec la grande distribution. C'est la preuve que, de zéro à sept mois, il est possible de passer sur un premier prototype qui fait des premières livraisons et donc que le digital offre cette accélération puisque qu'il permet de partir de rien pour aller vers des prototypes qui s'appuient sur des travaux de recherche longs.

A.- P. : Prenons une start-up qui se lance dans le digital et qui cherche à être soutenue. Comment doit-elle s'y prendre ? Elle s'adresse directement à vous ?

G. T. : Il y a deux types de startups. La première est la toute jeune start-up qui est au tout début de sa vie, qui va venir nous voir. Nous allons l'aider, au travers de notre INNOVATION FACTORY, à trouver deux ou trois partenaires dans notre écosystème et l'accompagner en co-investissant avec ces différents partenaires pour ainsi assurer le lancement d'une start-up. Ce sont des startups qui ne sont même pas encore créées. Nous allons accompagner leur création, les accompagner financièrement, leur permettre de travailler avec certains de nos étudiants et d'être mises en relation avec des acteurs de notre écosystème pour leur amener une solution technologique complémentaire à ce qu'elles peuvent apporter ou au contraire, leur donner accès à un marché quelque part en Europe.

La seconde est la start-up déjà existante, qui fait déjà du chiffre d'affaires et qui va se diriger vers la partie accélérateur de notre organisation. Une équipe de business développeurs va les aider à préparer leurs pitchs commerciaux de façon extrêmement concrète pour les mettre en relation avec différents acteurs de leur univers. Sur la partie de levée de fonds, si ces sociétés sont sur une première levée entre 5 et 10 millions d'euros, une équipe qui va les aider à la préparer.

On peut également être amené à accompagner une PME qui cherche à se digitaliser, qui a une problématique bien identifiée. Nous allons d'ailleurs organiser à la fin de l'année toute une série d'événements où les partenaires ou les différents acteurs qui souhaitent rentrer dans notre écosystème pourront venir présenter les problématiques business auxquels ils sont confrontés et trouver des solutions technologiques qui peuvent qui peuvent les aider.

A.- P. : Comment aidez-vous les entreprises déjà crées et bien installées à se digitaliser ?

G. T. : Nous allons les aider au travers de notre dispositif INNOVATION FACTORY. Si cette entreprise a identifié une problématique, elle prend contact avec nous. Si elle est à la recherche d'une solution technologique particulière pour répondre à un besoin, comme la cybersécurité, et nous l'orienterons vers notre accélérateur où de nombreuses sociétés européennes apportent des solutions sur ces questions. Nous pouvons aussi les mettre en relation pour qu'elles achètent des prestations de certaines des startups qu'on accélère. Soit il s'agit d'une PME qui souhaite, dans le cadre de transformation digitale, lancer un projet d'innovation dans une problématique identifiée. Elle bénéficiera alors de la possibilité de se regrouper avec d'autres partenaires européens et de travailler ensemble sur un modèle d'open d'innovation sur le lancement sur le marché de cette innovation, en allant chercher des compétences complémentaires.

A.- P. : Avec qui collaborez-vous au niveau de la France ?

G. T. : Nous sommes bien connectés avec l'écosystème français. Prenons l'exemple de l'INRIA dont le Président Bruno Sportisse est aussi membre du board EIT Digital. A cet effet, Bruno Sportisse facilite la mise en relation avec les écosystèmes majeurs de la Deep Tech en France.

Nous sommes également en lien avec BPI France dans le cadre de leur plan Deep Tech et avons pour intérêts communs la volonté de faire émerger de plus un plus de startups issues de la recherche publique en France.

En France, nos partenaires sont par exemple les pôles de compétitivité comme Systématic-Paris-Région, Cap Digital, Images et Réseaux, mais aussi des instituts de Recherche comme l'INRIA, le CEA et enfin des partenaires industriels comme ENGIE ou Ingenico et une multitude de PME et de startups.

A.- P. : Quels sont les événements marquants des années à venir ?

G. T. : 2020 est une année particulière car EIT Digital va célébrer son 10° anniversaire, à cet effet, tous les lecteurs des Affiches Parisiennes sont cordialement invités à se connecter le 29 octobre a 12h30 pour un anniversaire online, une grande première ! Sinon le 23 Septembre, nous organiserons notre VENTURE STANDUP EVENT, un évènement online permettant de mettre en relation startups et investisseurs également accessible à tous. Toutes les informations ne vont pas tarder à figurer sur notre site web. Enfin en décembre, aura lieu notre Innovation Day, je l'espère en présentiel. C'est un événement où l'on regroupe l'ensemble de notre écosystème et où l'on présente un ensemble de dispositifs, de projets. C'est un moyen d'être mis en relation avec les acteurs selon ses besoins. L'année dernière, nous l'avions organisé dans le cadre de la FinTech et nous avions eu le privilège d'avoir une intervention de Bruno Sportisse (INRIA) mais aussi du PDG d'Ingenico Nicolas Huss, tout comme les PDG des différentes startups que nous accompagnons à travers notre accélérateur au niveau européen. Nous avons également une série d'événements tout au long de l'année qui permettent à des startups de se présenter et qui regroupent à la fois des entrepreneurs, des investisseurs, des acteurs financiers et de la recherche pour faire à nouveau émerger des projets d'innovation de créations de startups.

A.- P. : Le Brexit a-t-il un effet sur votre activité, sur le développement du numérique en Europe ?

G. T. : Selon nous, l'innovation n'a pas de frontières. Effectivement, c'est un sujet que l'on ne peut pas négliger. Nous avons ouvert un bureau en Écosse l'année dernière, à Edimbourg, et nous travaillons avec eux comme avant, de manière très dynamique. Nous ne percevons pas d'impact majeur, le UK a toujours été un pays fort et le restera dans notre dispositif. Les questions de l'accompagnement de programmes européens vont se poser mais on ne voit pas d'impact particulier dans nos activités au quotidien. Nous venons de terminer toute la phase de sélection d'appels à projets pour l'année qui va venir et le UK y a une place importante.

A.- P. : Comment voyez-vous l'avenir digital européen ? Est-ce que l'Europe va arriver à se développer dans ce secteur ?

G. T. : L'Europe a perdu la bataille des plateformes digitales. Nous avons beaucoup de retard sur ces questions. Mais l'excellence de la recherche européenne va nous aider à replacer l'Europe au bon niveau. La France est extrêmement bien placée dans le classement de Shanghai, dans la version 2020, pour tout un tas de raisons mais notamment du fait que plus d'un tiers des instituts qui font de la recherche en intelligence artificielle sont européens. L'avenir du digital qu'on voit se dessiner s'appuie sur cette recherche pour créer les champions de demain. On a accompagné quelques entreprises qui se positionnent plutôt bien en la matière. Je pense qu'il y a une vraie prise de conscience en Europe sur le besoin d'aider ces jeunes pousses qui émergent et qui sont extrêmement prometteuses. La France est extrêmement dynamique dans ce domaine. On voit de plus en plus de startups qui commencent à grossir, avec des levées de fonds au-delà de 20 millions d'euros. Nous sommes persuadés que c'est la bonne voie puisque c'est une voie qui est difficile à copier pour nos cousins asiatiques et américains. L'avenir digital pour nous, c'est la Deep Tech et nous sommes heureux de voir que c'est un sujet qui devient central un peu partout. Grâce à la puissance de la recherche, l'Europe peut retrouver sa place. Il faut juste arriver à être souverain sur les questions essentielles.

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