Federec, la Fédération des entreprises du recyclage, publie chaque année une analyse globale de l'industrie du recyclage en France, à travers différents indicateurs économiques et sociaux, ainsi qu'une vision détaillée du marché par filière. Cette année, l'Observatoire statistique de la fédération fait le point sur une activité qui, au regard de la singularité de l'année 2020, apparait hors-normes.
Un secteur résilient malgré ses fragilités
L'année 2019 vient marquer un coup d'arrêt au cycle positif des années 2016-2018. Plusieurs événements ont fragilisé l'activité de la filière du recyclage en 2019, dont le tonnage global collecté connait une baisse de 0,2 % (hors BTP, soit 33,24 Mt contre 33,80 Mt en 2018). Toutes les filières n'ont pas été économiquement impactées de la même manière :
celle des Papiers-Cartons, qui affiche un recul de 3,2 %, les Métaux Ferreux (-4,6 %) et Non-Ferreux, ont subi des difficultés en 2019, alors que celles des activités BTP et Verre ont maintenu leur croissance avec respectivement +3 % et +2,1 %.
S'agissant du chiffre d'affaires du secteur du recyclage, pour la première fois depuis 2016, il connait une baisse de 6 %, pour atteindre en 2019 8,5 milliards d'euros. En raison des conditions de marché difficiles, la plupart des filières annoncent une forte baisse de leur chiffre d'affaires respectif.
Cependant, l'activité du secteur a su rester forte en 2019 et l'implication de la Fédération ne faillit pas. « Notre profession connaît aujourd'hui une crise de débouchés très inquiétante dans certaines filières, et cela pourrait venir mettre en péril l'avenir de nos entreprises. Par exemple, il est de notre devoir de mettre en lumière les craintes et défis auxquels sont confrontés les exploitants dans le cadre de la régulation des stocks. Nous continuons ainsi notre travail de communication auprès des pouvoirs publics pour encourager la mise en place d'incitations règlementaires à l'incorporation de matières premières issues du recyclage dans les nouveaux produits. Federec se félicite que ce sujet ait été consacré dans la loi relative à la lutte contre le gaspillage alimentaire et l'économie circulaire (AGEC) », commente la Federec.
En dépit des difficultés, les industriels de la filière se sont montrés résilients, un comportement qui a porté ses fruits puisque si en 2018, 50 % des entreprises interrogées indiquaient que l'année 2019 serait une année difficile, 35% des interrogés l'ont finalement jugé mauvaise. Au regard du contexte exceptionnel de l'année 2020, c'est sans surprise que trois chefs d'entreprise sur quatre déclarent anticiper une mauvaise année.
Malgré toutes ces inquiétudes, les entreprises ont continué d'investir dans de nouveaux équipements, convaincus de la nécessité de se moderniser afin d'être capables de répondre aux défis des prochaines années. Elles ont ainsi investi 625 millions d'euros, soit une hausse de 2 %.
Des répercussions sur l'emploi
La baisse du tonnage collecté et la situation économique critique ont influé à la baisse l'emploi dans la filière du recyclage, qui diminue de 1 % en 2019, pour compter 30 800 salariés, dont 87 % en CDI. Le recours à l'intérim a, lui aussi, subi les difficultés économiques et ne représente plus que 13 % du volume total des salariés, contre 15 % en 2018. Quant au nombre d'entreprises exerçant une activité de recyclage en France, il a augmenté d'environ 2 400 établissements supplémentaires, soit 1 200 entreprises en 2019. Cette donnée a été revalorisée grâce à l'accès de la Federec à la base de données publique Gerep du ministère de l'Environnement, via son expert soumis au secret statistique.
« Certaines régions comme l'Occitanie, la Nouvelle Aquitaine ou les régions Bretagne et Pays de la Loire (regroupées chez Federec au sein de Federec Ouest), connaissent depuis plusieurs années une évolution positive du nombre d'établissements, notamment en raison de la nécessité de collecter au plus près des lieux de production pour limiter les transports et les coûts. Ces évolutions régionales positives sont contrebalancées par une concentration sectorielle qui se poursuit. L'innovation est au cœur des métiers du recyclage et certains flux demeurent aujourd'hui difficiles à valoriser, ce qui permet à des acteurs innovants de se démarquer avec des technologies et des procédés nouveaux », explique Manuel Burnand, directeur général de Federec.
Une valorisation hétérogène des matières selon les filières
En 2019, les entreprises de recyclage ont continué de subir une dégradation préoccupante et constante de la valorisation des matières en aval ainsi que des complications des marchés avals, nationaux et internationaux et une augmentation des problématiques des entreprises de recyclage à valoriser leurs refus de tri en installations de stockage de déchets non dangereux. Conséquence, les difficultés des filières affaiblies se sont accentuées.
Tout d'abord, la filière métaux ferreux a subi, en 2019, une chute des tonnages collectés de 4,6 % par rapport à l'année précédente, avec 12,3 mégatonnes collectées, et a dû faire face à une baisse drastique des prix de vente et à l'augmentation des coûts d'enfouissements sur les déchets ultimes. Ensuite, pour la filière des plastiques, si elle affiche une augmentation de la collecte de 6,3 % en 2019, ses entreprises évoluent dans un contexte complexe avec des enjeux qui peuvent mettre en péril l'ensemble de la profession, comme la saturation des exutoires, la chute des prix avec la fermeture des exportations hors UE ou encore l'extension des consignes de tri entraînant une hausse des volumes.
A contrario, l'année 2019 a été bénéfique pour la filière verre avec une progression de 1,9 %. La collecte du verre ménager est en progression régulière et le verre d'emballage reste un marché pérenne. L'activité du verre plat génère, à elle seule, une augmentation remarquable de 22%.
à l'heure où la transformation du secteur du recyclage en France est primordiale, les entreprises expriment davantage d'inquiétudes pour l'année prochaine. Avec des filières, comme les papiers-cartons, au bord de la rupture début 2020, l'arrêt partiel des activités du recyclage pendant la crise sanitaire engendrerait un net repli du chiffre d'affaires des entreprises du recyclage sur l'année. La crise sanitaire n'est toutefois pas la seule source de craintes car les travaux de mise en place de la REP BTP, la décision de la Chine sur l'arrêt des importations de déchets solides, ou encore les limitations des tonnages acceptés en installations de stockage de déchets non dangereux sont autant de paramètres qui annoncent une année 2020 hors-normes pour les filières du recyclage.