Le bilan national des entreprises pour 2022, élaboré par le Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce (CNGTC) et par l’institut Xerfi Spécific, a dernièrement été présenté par Thomas Denfer, président du CNGTC, et Laurent Frelat, vice-président de Xerfi Spécific. Basée sur l’analyse des données des six millions d’entreprises immatriculées au registre du commerce et des sociétés (RCS), la cinquième édition de ce baromètre a permis d’analyser la situation des entreprises en 2022, qui ont été confrontées à différentes crises, aussi bien sanitaire, géopolitique, qu’économique et énergétique.
Lors de la présentation de ce bilan 2022, Thomas Denfer a rappelé « le rôle primordial et central » des greffiers des tribunaux de commerce, notamment en précisant qu’à travers « le Groupement d’intérêt économique (GIE) infogreffe, nous avons reçu deux millions et demi de formalités réalisées directement par voie électronique, en démarche 100 % dématérialisée ». Il a ensuite salué « la résistance du tissu entrepreneurial français face à l'accumulation de crises qui ont frappé notre pays ces dernières années ». « Charge à nous, entrepreneurs du service public, de répondre présents avec efficacité et humilité pour soutenir cet esprit d'entreprendre et être source de sécurité juridique et de confiance économique », a-t-il également indiqué. Après la brève introduction du président du CNGTC, Laurent Frelat a pris la parole pour donner les chiffres et établir une comparaison avec les bilans des années précédentes.
Création d’entreprise : « un retour à la normale »
Sur l’ensemble de l’année 2022, l’étude a révélé la création de 573 132 entreprises, soit plus de 110 000 entités en plus que celles enregistrées en 2019, avant la crise sanitaire. Toutefois, un ralentissement de 6,2 % est à noter par rapport à 2021. La dynamique entrepreneuriale est une « nouvelle fois tirée » par l'auto-entrepreneuriat : un tiers des immatriculations de 2022 sont des entreprises individuelles, incluant les micro-entreprises. « Au-delà d'un retour à la normale, nous constatons que le goût d'entreprendre, qui était apparu à l'issue de la crise Covid, a perduré, et cela, malgré une situation économique clairement peu propice », a commenté Laurent Frelat.
Du côté des secteurs, les activités immobilières se démarquent. En effet, elles ont représenté plus d'une entreprise sur cinq créées sur l'année, avec 20,7 %, suivies par le commerce à 16,8 %, puis par les activités de conseils et services aux entreprises à 14,8 %. À l'inverse, la part des immatriculations issues des secteurs du transport et de l'entreposage, particulièrement dynamiques en 2021 du fait de l'essor du e-commerce et de la livraison à domicile, de la construction et de l'agriculture-sylviculture ont respectivement chuté de 6, 10 et 12 points en un an.

Des radiations et des procédures collectives en hausse
Sur l’année 2022, le baromètre a indiqué que 346 511 entreprises ont été radiées du Registre du commerce et des sociétés (RCS), soit près de 36 000 radiations supplémentaires par rapport à 2021, et une hausse de 11,6 %. « Un nouvel état d’esprit est né ! Confrontés à des difficultés croissantes de paiement et de trésorerie, couplées à une conjoncture économique difficile et à la disparition des mesures gouvernementales de soutien, nombre de chefs d'entreprises ont préféré mettre volontairement un terme à leur activité et souvent pour se redéployer sur d’autres métiers. Nous pouvons considérer cet indicateur, comme finalement le témoignage d’une certaine vitalité », a expliqué le vice-président de Xerfi Spécific.
Le nombre d'entreprises en difficulté a lui aussi progressé par rapport à 2021, avec 37 468 procédures collectives ouvertes en 2022, une augmentation de 52 % à un an d'intervalle. Pour expliquer ce phénomène, le Bilan a mis en avant « des effets à retardement de la crise sanitaire et de la dégradation du contexte économique international », mais a souligné que le total des procédures collectives reste tout de même nettement inférieur aux niveaux observés en 2018 et 2019, où elles étaient près de 45 000.
A noter que le secteur le plus touché par les radiations, avec 22,3 % du total sur l’année, et des entreprises en difficultés, avec 23,5 %, est celui du commerce.
L’IDF a l’une des meilleures dynamiques régionales
Une illustration a enfin été présentée par région. L’Île-de-France s’est distinguée des dynamiques régionales observées à l'échelle de l'Hexagone : la création d'entreprises y a enregistré son plus faible recul, de 4,2 % contre 6,2 % de moyenne nationale, les radiations s'y sont stabilisées à moins 0,4% contre une hausse de 11,6% sur le reste du territoire français. Du côté des procédures collectives, elles sont limitées à une progression de 35 % par rapport à 2021. Les plus forts ralentissements dans l’immatriculation entrepreneurial ont été enregistrés dans le Centre-Val de Loire, les Hauts-de-France, le Grand-Est et la Nouvelle Aquitaine. Pour les radiations, Mayotte et la région Provence-Alpes-Côte d’Azur ont subi les plus fortes progressions avec près de 50 %.
Des inquiétudes pour l’année à venir
« Le maintien totalement anachronique de l'emploi et dans une moindre mesure, de l'investissement, qui aujourd'hui, constitue clairement les clés de voûte de la résistance de l'économie française, sont remis en cause, et faute d'un retour rapide à des niveaux d'inflation plus modérés, l'ajustement que l'on peut craindre sur l'emploi risque d'être relativement brutal et d'entraîner une contraction de la demande qui risque de ne pas être sans conséquence sur la vitalité du tissu entrepreneurial », a indiqué avec inquiétude Laurent Frelat. « Mais, le pire n’est jamais sûr, et l'amorce d'une certaine modération de l'inflation peut permettre d'espérer que nous saurons échapper effectivement à ce retournement de situation sur l'emploi et sur toutes ses conséquences, notamment sur la demande, la consommation et sur la vitalité du tissu entrepreneurial français », a-t-il conclu.
