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Avocats en entreprise : pour Marc Mossé, le temps est au dialogue

Sujet sensible au sein des professions du droit, l'avocat salarié en entreprise a fait l'objet d'un webinaire organisé par l'Association française des juristes d'entreprise (AFJE) au cours duquel son président Marc Mossé a répondu aux questions posées en ligne par les participants.
Avocats en entreprise : pour Marc Mossé, le temps est au dialogue
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Pour l'AFJE, créer l'avocat salarié en entreprise répond à l'enjeu crucial de la garantie des droits des entreprises françaises qui sont fragilisées en étant les seules dans les grandes économies à ne pas bénéficier de cette protection dans un environnement international et géopolitique tendu. Il en va ainsi de la compétitivité et de l'attractivité de la France. Lors de ce webinaire, Marc Mossé a répondu aux questions suscitées au sein la communauté du droit par la réforme de la confidentialité et de l'avocat en entreprise et affirmé que l'heure est à la concertation pour créer un statut permettant d'asseoir la confidentialité des écrits des juristes d'entreprise.

L'état actuel du dossier

La question de l'avocat en entreprise a été abordée en fin d'année dernière par le ministre de la Justice Eric Dupond-Moretti, lors des débats sur loi de finances, évoquant son intention de créer un tel statut dans le cadre d'une expérimentation. Après cette annonce, les premières réactions, et majoritairement négatives, ont eu trait, non pas au statut, mais à la confidentialité. Comme l'a rappelé Marc Mossé, l'objectif de cette réforme est de protéger les avis et consultations des avocats au sein des entreprises pour renforcer la compétitivité de ces dernières, rendre l'attractivité de la place du droit en France et renforcer le rôle de la communauté des avocats et des juristes sur le territoire national. En janvier dernier, la Chancellerie a publié un avant-projet de loi sur ce statut, encore au stade préliminaire et soumis à la concertation, afin de définir le véhicule législatif adéquat. Il est, comme l'a souligné le président de l'AFJE, destiné à rejoindre un projet de loi plus vaste contenant différentes réformes défendues par le garde des Sceaux : le secret professionnel de l'avocat, l'encadrement des enquêtes préliminaires ou encore la déontologie des officiers publics et ministériels. L'AFJE a été saisi de cet avant-projet pour avis, tout comme les instances représentatives des avocats, dont beaucoup ont fait valoir un avis négatif, soit sur le principe, soit sur la méthode, et souhaitant d'autres discussions. Selon Marc Mossé, cette réforme est une réelle avancée mais certains points nécessitent effectivement d'être modifiés et améliorés.

Ouvrir le dialogue

Afin d'aborder, voire de tenter de résoudre, les questions et points de blocage relatifs à cet avant-projet, le garde des Sceaux, l'AFJE et le Cercle Montesquieu, l'association des directeurs juridiques, se sont donc réunis pour amorcer le dialogue, que Marc Mossé estime nécessaire pour faire avancer un dossier « qui n'est pas nouveau » et qui a connu de nombreuses tentatives d'avancées législatives infructueuses. Il a d'ailleurs de nouveau été abordé parle garde des Sceaux, qui s'est exprimé lors de la clôture de l'assemblée générale statutaire de la Conférence des bâtonniers le 29 janvier dernier. Souhaitant clarifier certains points, Eric Dupond-Moretti a tout d'abord relevé qu'il ne pouvait pas ne pas se saisir de ce dossier, majeur pour le droit français, les juristes et les entreprises françaises, et a insisté sur le fait qu'il ne s'agit que d'un avant-projet, en phase de dialogue, qui n'exclue aucunement l'examen d'autres options, à l'instar du juriste en entreprise doté du legal privilege. Enfin, le garde des Sceaux a indiqué qu'il inviterait à la Chancellerie toutes les parties prenantes pour échanger sur les différents points du dossier. « Maintenant s'ouvre un temps de la concertation et, nous l'espérons, le temps de dégager un consensus ».

La confidentialité, un des enjeux majeurs de la réforme

Pour l'AFJE, si dialogue il doit y avoir, il ne doit pas s'éloigner du sujet majeur qu'est la confidentialité des avis et analyses juridiques. Loin d'être une « revendication corporatiste », Marc Mossé estime qu'il s'agit d'une opportunité de protéger davantage les avis et consultations et le droit en entreprise. Il est indispensable de renforcer la place du droit au sein des entreprises et de doter les juristes de cette « arme » qu'est la confidentialité, pour exercer pleinement leur activité et faire que la culture du droit s'ancre dans le milieu de l'entreprise. « Le débat est une opportunité extraordinaire pour que nous puissions dire ce que sont les juristes d'entreprise, ce qu'est notre travail, le rôle que nous jouons (…) et en quoi doter les juristes de la confidentialité revient à doter la profession d'un outil qui renforcera le droit », a-t-il indiqué. La conviction de ce dernier est que la confidentialité permettra de renforcer la communauté juridique et le poids du droit dans l'entreprise, pour qu'il soit perçu comme un outil stratégique, un élément de confiance. Il a indiqué que dans les pays où il existe une communauté juridique, avec des avocats d'entreprise ou des juristes disposant du legal privilege, le marché du droit est plus fécond, de demande induite et renforce le pouvoir de prescription des directions juridiques. Il a d'ailleurs souligné que, parmi les grandes économies mondiales, la France est l'une des rares où cette confidentialité n'est pas reconnue aux juristes d'entreprise, une situation de faiblesse dans laquelle elle se positionne, y compris en Europe.

Non, il n'y aura pas de « sous-avocat »

Se voulant rassurant face aux craintes exprimées par les participants, Marc Mossé a affirmé que le projet n'a, à aucun moment, vocation à créer une concurrence à l'encontre des avocats. Si l'objectif de la création de ce statut est de renforcer la fonction de conseil en entreprise et la façon dont elle s'exerce, cela ne préjudiciera pas l'employabilité des jeunes juristes, tant de ceux entrants que de ceux déjà dans l'entreprise. « Ils ne seront pas pénalisés dans les carrières, même face à des avocats salariés car ils seront dans la même situation objective en termes de diplôme, d'expérience et de pratique dans l'entreprise. », a indiqué le président de l'AFJE. « Nous ne voulons pas d'un statut qui discrimine deux juristes d'entreprise dans la même situation », a-t-il assuré. Les avocats ne veulent pas de sous-avocats tout comme les juristes ne veulent pas de sous-juristes et, il l'affirme, il n'y en aura pas car un consensus peut être trouvé en ce sens. De la même manière, il n'est pas question que le projet permette aux avocats en entreprise de développer leur clientèle personnelle.

Le sujet est donc sur la table et le projet de loi devrait être examiné durant cette année parlementaire. « Nous sommes dans une actualité assez chaude, peut-être même une forme d'urgence », indique le président de l'AFJE qui souligne l'opportunité pour la profession du droit de dialoguer avec un garde des Sceaux qui s'empare de ce sujet. Le webinaire s'est clôt sur des mots rassurants, confiants quant à la possibilité pour la filière juridique de tracer un chemin d'avenir, respectueux des principes auxquels elle ne dérogera pas, comme la confidentialité.

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