David Coste, son directeur général, nous présente l’activité du groupe, ses ambitions et ses projets.
Affiches Parisiennes : En tant que directeur général de Forterro France, pouvez-vous nous présenter l’activité de votre groupe, en France et dans le monde ?
David Coste : Le groupe Forterroest un groupe d’éditeurs de logiciel qu'on qualifie d’ERP, pour Entreprise Ressource Planning, c'est-à-dire des logiciels de gestion d'entreprises qui s'adressent à des PME industrielles, de 10 à 1 000 employés. Notre cœur de business est de vendre des logiciels, que ce soit en Saas ou plus traditionnellement installés chez nos clients. L’objectif c’est que nos clients puissent eux-mêmes faire leur travail c’est-à-dire fabriquer quelque chose et le vendre.
S’agissant de Forterro France, l’entreprise comptera 400 salariés d’ici la fin de l'année et recense à peu près 3 500 clients sur tout le territoire.
A.- P. : Pourriez-vous nous donner un exemple d'application de ces logiciels ?
D. C. : Prenons l’exemple d’un fabricant de pièces d’automobile. Il lui faudra un logiciel qui va lui permettre de planifier les composants dont il aura besoin pour pouvoir fabriquer les pièces qu’il vendra à ses clients. Il pourra s’approvisionner grâce au logiciel et une fois les pièces arrivées dans les ateliers de production, il pourra planifier et mettre en œuvre la fabrication. A l'issue de cette étape, suivront le stockage des pièces, l’expédition vers le client final en respectant un calendrier défini, la facturation et la comptabilité. Le logiciel gère toute cette chaîne de gestion de l’entreprise, depuis la planification jusqu'à la facturation et la comptabilité.
A.- P. : Vous avez plusieurs structures en France. Pouvez-vous nous en citer quelques-unes ?
D. C. : Ce sont aujourd'hui des marques mais qui étaient auparavant des filiales. Ces marques sont Sylob, Clipper, Helios Silog et ProConcept. Le groupe Forterro a grandi à la fois par croissance organique et par acquisitions. Toutes les marques actuelles ont été acquises à un certain moment de notre vie et aujourd'hui, chacune d’entre elles et chaque logiciel ont un positionnement bien spécifique, afin de servir des entreprises de secteurs d'activités différents et de tailles différentes. Par exemple, le logiciel Clipper est particulièrement bien adapté à toutes les industries du métal et aux entreprises de 5 à 50 salariés. C'est vraiment son cœur d'activité. A l'inverse, le logiciel Helios est extrêmement bien adapté aux industries de l'aéronautique et est moins concerné par des problématiques de taille. Tous nos logiciels ont un positionnement particulier sur le marché qui leur permet d'être performants sur ce segment et qui nous permettent de les positionner les uns par rapport aux autres lors de la commercialisation.
A.- P. : Vous avez également une activité internationale, au sein, comme en dehors, de l'Union européenne. Pouvez-vous nous en dire quelques mots ?
D. C. : Le premier achat du groupe a été fait en Suède et depuis, c’est dans notre ADN de grandir à l'international et surtout en Europe, qui est notre cœur de marché. Aujourd'hui, nous sommes présents en Suède, en Allemagne, en Suisse, en Pologne et en Angleterre. Nous cherchons aussi à grandir sur les autres pays européens où nous ne sommes pas encore. Il y a des distributeurs en Espagne et au Bénélux, mais nous avons l’ambition d'être présent directement sur tous les marchés européens. Sur ces différents marchés, nous avons procédé à des acquisitions d’éditeurs de logiciels ERP qui ont le même ADN ou très proche de celui de la France, à savoir des éditeurs qui sont placés sur le midmarket et qui servent des clients industriels. Notre stratégie par rapport à l'ensemble de ces solutions n'est pas de les fusionner pour en faire un seul logiciel mais de renforcer chacune de leurs spécificités pour en faire la meilleure version d’eux-mêmes afin qu'ils soient encore plus performants sur leurs segments de marché. Notre stratégie c’est de leur apporter les capacités financières et organisationnelles d’un groupe pour leur permettre de se développer et d'accélérer leur développement.
A.- P. : Comment un client peut savoir si votre logiciel lui sera utile ? Comment va-t-il vous trouver ?
D. C. : Dans le métier de logiciel de gestion d’entreprise, ce qui fait toute la différence est ce qu'on appelle l’adéquation fonctionnelle entre les logiciels et les besoins métier du client final. Les clients achètent nos logiciels non pas parce que ce sont les plus aboutis technologiquement, il y en aura toujours un autre qui le sera encore plus, mais parce que chaque logiciel a été développé pour les besoins des clients qui sont intéressés par les spécialités de nos logiciels. Si on prend Helios, toutes ses fonctionnalités ont été développées avec des clients du secteur de l’aéronautique. C'est ce qui fait que ces logiciels sont complètement adaptés à l'utilisation du client dans un secteur spécifique. Chacun de nos produits ont des spécialisations dans des secteurs d'activité donnés et prouvent aux clients qu’ils fonctionneront avec leur propre métier. On propose des logiciels qui vont permettre aux entreprises de gérer leur commerce, leur production, en totale adéquation avec leur métier et c'est ce qui fait toute la différence entre les ERP, qui conviendront à un certain type de clients et pas à d’autres.
A.- P. : Vous avez connu une forte croissance qui a abouti à votre rachat par Partners Group. Votre PDG a d’ailleurs annoncé que vous développiez une nouvelle stratégie, Forterro 3.0. Pouvez-vous nous en parler ?
D. C. : Avec Partners Group, nous avons l’ambition de tripler la taille du groupe dans les quatre à cinq ans qui viennent, via de la croissance organique et de la croissance externe. Nous allons suivre notre modèle, à savoir acquérir des éditeurs ERP dans les différents pays européens qui visent le midmarket industriel. Ça restera le premier pilier de croissance. Nous avons aussi décidé, dans le cadre de Forterro 3.0, de lancer une suite de logiciels paneuropéenne, un logiciel qui sera le même dans l'ensemble de l'Europe et dont l'objectif est de venir compléter le portefeuille d'offres de logiciels que nous avons dans chacun des pays[DC1] . Cette nouvelle solution nous permettra, sur l'ensemble de nos marchés, d’élargir notre marché cible en ayant un logiciel plus générique qui saura s'adresser à un ensemble de segments de marché ou à un certain nombre, qui n'étaient pas adressés jusque-là.
A.- P. : Partners Group est-il un actionnaire financier uniquement ou s’implique-t-il aussi dans le développement de votre entreprise ?
D. C. : Comme tout fonds d'investissement, son objectif est d'avoir un bon retour sur investissement et donc d’investir dans les entreprises les plus solides et avec le plus de potentiel de développement. Nous sommes donc très heureux que Partners Group ait décidé d'investir 1 milliard sur nous, cela prouve qu’ils croient en notre entreprise et en notre développement. Nous leur avons expliqué qui nous sommes mais aussi où nous voulons être dans quatre à cinq ans, et comment. C’est la trajectoire prévue pour l'entreprise qui a incité Partners Group à investir. Ils ont donc déjà validé notre plan de développement.
Ils s'impliqueront aussi dans la gestion, et vont nous accompagner ou nous apporter une expertise quand nécessaire pour nous aider à nous développer.
A.- P. : Quels sont vos prochains projets d’acquisition ?
D. C. : Ce que je peux dire pour le moment c’est que, si les fondements de notre groupe sont des éditeurs ERP, sur les segments industriels, nous avons des clients qui utilisent souvent des logiciels connexes qui vont leur permettre de faire des choses que les ERP ne font pas, raison pour laquelle nous avons décidé d'élargir notre stratégie d’acquisition pour nous ouvrir à des logiciels connexes aux ERP. En effet, notre parc de clients grandit de plus en plus, tout comme la demande et notre capacité à déployer un logiciel sur une large base de clients. Nous regardons donc les solutions logicielles qui complètent une offre ERP.
A.- P. : En tant qu'acteur dominant dans le milieu de l'industrie en France, observez-vous un phénomène de réindustrialisation de la France ?
D. C. : Je n'ai pas de métriques à vous donner ni de quantitatif, c’est plus une impression générale. On sent que certains clients rapatrient des ateliers ou des usines en France. Mais j'aurais du mal à faire une statistique ou à vous donner un chiffre. Depuis la fin du Covid, on observe en revanche pas mal de dépôts de bilan, de cessations d'activité sur les petites sociétés. S’agissant de la réindustrialisation, en tant qu’acteur de ce marché là, nous avons pour futur projet d’aider les industriels français.
A.- P. : La France reste-t-elle toujours un pays attractif pour vos différents projets ?
D. C. : La France est un pays avec une tradition industrielle qui s’est un peu perdue. Les sociétés sont très compétitives mais manquent parfois d'accompagnement, et notamment dans le numérique. Il y a une chose qui est quand même très marquante en France, c'est qu’elle continue à subventionner les projets de logiciels quand ils sont installés chez les clients. Or ça, c'est l'ancienne génération de logiciels. Aujourd'hui, un client ne devrait plus acheter un logiciel et l'installer sur sa machine. Il devrait au contraire acheter du Saas mais comme il n’est pas subventionné, régulièrement nous voyons avec notre logiciel Sylob qui est notre porte-étendard dans le Saas, se tourner finalement vers les solutions installées sur leurs propres serveurs pour cette unique raison. Je trouve cela dommage. Nous devrions être parmi les pays les plus modernes et on ne l’est pas.
A.- P. : Qu'attendez-vous justement des Pouvoirs publics pour avancer là-dessus ?
D. C. : Tout d’abord, ils devraient subventionner les projets en Saas et pas seulement ceux installés chez les clients. Ensuite, sur tout ce qui est lié à l'accompagnement des formations, aujourd'hui le paiement des prestations de formation par l’organisme gouvernemental qui en a la charge, est beaucoup trop long. On ne peut pas continuer à être payé des mois après la prestation effectuée.
A.- P. : Quel est votre positionnement vis-à-vis du Saas ?
D. C. : La stratégie du groupe a toujours été de se positionner sur le Saas, particulièrement en France mais, encore aujourd'hui, certains clients sont frileux d’y aller, par crainte de la localisation des données. Les pays étrangers vont beaucoup plus vite que nous sur ces technologies là et à raison. Les technologies Saas sont complètement matures et apportent énormément aux clients, que ce soit sur l'aspect de sécurité, de fiabilité ou de rapidité de déploiement de l'usage et donc de compétitivité in fine. J'aimerais que notre pays ne soit pas à la traîne sur toutes ces technologies, parce que c'est ce qui va permettre à nos PME de devenir des ETI et aux ETI à devenir de grandes entreprises. Il faut absolument qu’elles dématérialisent leur processus, développent l'industrie 3.0 et 4.0. Le seul moyen pour elles de le faire à une vitesse suffisante par rapport à la concurrence internationale c’est d'utiliser le Saas. Les Pouvoirs publics et nos clients industriels doivent le réaliser parce que l'informatique d’hier ne leur permettra pas de continuer à aller à la vitesse à laquelle le monde d’aujourd’hui leur demande d’aller. Le Saas est le seul et unique moyen de pouvoir continuer à suivre toutes ces évolutions, qui vont à vitesse grand V.
[DC1]J’ai préféré enlever l’exemple qui, à la relecture, me semble plus troubler la compréhension que la simplifier.