Alors que la COP26, qui se tiendra à Glasgow, approche à grands pas et que les experts du GIEC ont récemment publié leur rapport sur l’évolution du dérèglement climatique, le Sénat a organisé une audition des experts français afin d’échanger sur les solutions à mettre en place pour y lutter efficacement. L’audition a débuté par une présentation des conclusions de leur dernier rapport, avant des échanges parfois légèrement tendus, entre scientifiques et sénateurs.
COP21 : objectifs probablement pas atteints
En 2015, la COP21 qui se tenait à Paris fixait l’objectif de ne pas dépasser les 2 °C d’augmentation de la température par rapport à l’ère préindustrielle d’ici 2050. Six ans plus tard, cet objectif semble inatteignable selon les experts du GIEC. Alors que l’augmentation de la température est déjà de 1,1°C, il faudrait un changement très rapide et une véritable révolution écologique au niveau mondial pour que les objectifs soient tenus. Pour cela, les experts comptent sur la COP26 pour qu’une prise de conscience mondiale ait lieu. Le GIEC estime que les pays du G20 doivent s’emparer rapidement de ces enjeux, notamment l’Inde et la Chine, qui sont aujourd’hui les deux plus gros émetteurs de gaz à effets de serre dans le monde. Il est également important que les pays riches accompagnent les pays du Sud dans leur transition énergétique.
Des conséquences déjà observables
L’augmentation de la température a des conséquences déjà visibles aujourd’hui et qui sont amenées à s’amplifier et à se multiplier dans les années à venir. En France notamment, les inondations, sécheresses, incendies et généralement l’ensemble des phénomènes climatiques exceptionnels vont se multiplier dans les prochaines années. Il s’agit d’une conséquence des émissions de gaz à effets de serre et de l’augmentation des températures. Pour Valérie Masson-Delmotte, paléoclimatologue, directrice de recherche au Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) et coprésidente du groupe nᵒ 1 du GIEC, la France va subir une hausse importante de la température : « Selon nos recherches, la hausse des températures pour les pays de l’Europe de l’Ouest, dont la France fait partie va être supérieure à la hausse moyenne des températures à travers le monde. » Elle explique également que le sud-est de la France va voir le nombre de pluies torrentielles et inondations se multiplier dans les prochaines années. Selon elle, il est grand temps d’agir, afin d’atténuer les conséquences de ce bouleversement climatique : « Même si des conséquences sont déjà visibles, l’action de l’homme dans les prochaines années, influera sur l’importance des bouleversements engendrés par le réchauffement climatique. Les décisions que nous prendrons rapidement auront un impact dans les années à venir ».
Le GIEC a étudié plusieurs scénarios scientifiques, se basant sur plusieurs hypothèses. La première est celle d’une prise de conscience des Etats et d’une véritable politique de lutte contre le réchauffement climatique dans les prochaines années. Dans cette optique optimiste, le réchauffement climatique se stabiliserait autour des 2 °C. Si, à l’inverse, rien n’est fait dans ce sens, la température va continuer d’augmenter de façon importante et pourrait atteindre jusqu’à 3 °C si nous gardons le même rythme qu’aujourd’hui. Dans la pire des perspectives envisagées, le réchauffement climatique pourrait même atteindre 4,5 °C d’augmentation.
L’activité humaine influe sur le réchauffement climatique
La grande avancée de ce sixième rapport du GIEC est qu’il permet de prouver que l’activité humaine est responsable de la quasi-totalité du réchauffement climatique. Pour affirmer cela, les experts ont présenté aux sénateurs un graphique montrant l’évolution de la température depuis plusieurs siècles. Il apparaît alors que la température se met à augmenter très rapidement à partir de 1850, date du début de la révolution industrielle. Le réchauffement s’accélère alors progressivement entre cette date et aujourd’hui. L’objectif est désormais de ralentir cette courbe pour la faire stagner et éviter des catastrophes trop importantes. La cause du réchauffement est donc établie, il s’agit des émissions de gaz à effets de serre, notamment le dioxyde de carbone (CO2) et le méthane (CH4). L’objectif est donc de réduire le plus rapidement nos émissions de gaz à effets de serre pour produire notre énergie.
Des sénateurs à l’écoute
Les sénateurs de la commission développement durable ont assisté à cette présentation avant de pouvoir poser leurs questions aux experts. Les échanges se sont orientés sur le nucléaire, la démocratie participative et la décarbonation de l’énergie. Sur la question du nucléaire, les experts ont répondu ne pas avoir de solutions miracle, mais qu’un mélange des différents moyens de production d’énergie, nucléaire, solaire et éolien, leur semble être aujourd’hui la meilleure solution pour éviter d’avoir une production carbonée. Sur la question de la démocratie participative, Valérie Masson-Delmotte a exprimé son souhait d’impliquer les citoyens dans la transition écologique, à travers la mise en place de structures de démocratie participative, à l’image de la convention citoyenne pour le climat. Une annonce qui a quelque peu agacé Daniel Guéret, sénateur Les Républicains d’Eure-et-Loir qui a rétorqué ne pas avoir de leçons de démocratie à recevoir de la part de la scientifique.