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« J'ai beaucoup œuvré pour rendre lisible la Métropole du Grand Paris »

Le président de la Métropole du Grand Paris retrace son combat permanent pour une Métropole du Grand Paris forte, à l'aune du plan de relance et de la transition écologique. Il revient également sur l'importance de l'aire métropolitaine dont la vocation est de gérer la zone dense.
« J'ai beaucoup œuvré pour rendre lisible la Métropole du Grand Paris »
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Affiches Parisiennes : Comment la Métropole du Grand Paris amorce-t-elle la transition écologique ?

Patrick Ollier : Le 15 mai 2020, nous avons mis en place un plan de relance de 110 millions d'euros, décliné en 50 actions, qui concerne plusieurs domaines. Nous avons voulu que ce plan de relance s'inscrive dans celui de l'État de 100 milliards d'euros. J'ai rencontré le Premier ministre il y a quelques semaines pour lui demander qu'on puisse coordonner les initiatives de la métropole avec celles du Gouvernement dans différentes thématiques, notamment l'écologie, la compétitivité et la cohésion. Début 2021, nous pourrons formaliser ces travaux par une contractualisation entre l'Etat et la Métropole du Grand Paris qui prendra la forme d'un “contrat de relance et de transition écologique” (CRTE). C'est ce que nous essayons de faire à la Métropole, notamment à travers des initiatives dans le cadre du Plan vélo métropolitain. Nous avons mis 10 millions d'euros de plus pour le développement de ce Plan en créant 100 stations nouvelles de Vélib' d'ici 2022. Nous en avons déjà créé 400 de ces stations, ce qui constitue un développement très important des circulations douces. Nous mettons également en œuvre un programme de rénovation énergétique, notamment le développement de programmes de solarisation du patrimoine public.

Ces opérations aident à financer la mise en place du panneaux photovoltaïques sur des équipements publics. Nous avons signé le 19 décembre 2019, une convention sur le programme SARE avec l'État. Votée à l'unanimité par le Conseil métropolitain cette convention permettra le déploiement du programme SARE dans le périmètre métropolitain pour la période 2020-2022, avec une enveloppe budgétaire fixée à plus de 26,6 millions d'euros sur la période, dont près de 7 millions d'euros mobilisables par la Métropole. Nous sommes très engagés dans la rénovation et dans la réhabilitation de l'habitat dégradé dans le tissu pavillonnaire. Par exemple, dans l'Est de Paris, nous avons engagé ce type d'action sur Clichy-sous-Bois et Montfermeil.

Nous sommes également engagés de manière très forte dans la lutte contre la pollution de l'air. Il faut savoir que dans le périmètre de la métropole, nous déplorons chaque année le décès de 6 600 personnes, à cause des particules fines. Nous avons décidé de d'instaurer progressivement une zone à faibles émissions au sein de la métropole depuis juillet 2019. Il faut savoir que la métropole, c'est aujourd'hui 7 200 000 habitants et 131 villes. La Zone à faibles émissions (ZFE) métropolitaine concerne 79 de ces villes et un peu plus de 5 millions d'habitants au sein du périmètre de l'A86. Dès juin 2021, nous passerons à la prochaine étape de la ZFE en interdisant la circulation des véhicules Crit'Air 4 et 5, à certains horaires, dans cette zone, dont l'entrée sera marquée par des panneaux. Il s'agit de la plus grande de France et même l'une des plus grandes d'Europe. Cette action contribue à montrer à la Commission européenne que nous sommes résolument engagés en France dans la lutte contre la pollution. D'ailleurs, la Commission européenne sanctionne financièrement les villes qui seront obligées de payer une amende en cas de non-respect des normes. Il faut donc être très prudent et très engagé.

Nous sommes soutenus par le Gouvernement pour ces démarches. Je remercie Barbara Pompili, ministre de la Transition écologique, avec laquelle j'ai de longues discussions. Jean-Baptiste Djebbari, ministre délégué auprès de la ministre de la Transition écologique, chargé des Transports, nous a également beaucoup aidé, par exemple pour le microcrédit qui va permettre à la Métropole du Grand Paris d'aider les personnes les plus défavorisées qui veulent acheter un véhicule propre. Nous avons, par ailleurs, mis en place avec l'Etat des aides qui peuvent aller jusqu'à
19 000 euros pour l'achat d'un véhicule propre neuf et 12 000 euros pour un véhicule d'occasion. Mais il y a toujours un reste à payer. J'ai tenu à ce que le Gouvernement nous aide à le gérer. Les ministres Barbara Pompili et Jean-Baptiste Djebbari ont pris l'engagement de créer un microcrédit, justement pour aider les plus modestes à supporter ce reste à charge. Nous avons tout prévu pour aider au mieux les Métropolitains à changer de véhicule dans les années qui viennent.

A.-P. : Et concernant les véhicules électriques ?

P. O. : Bien entendu. D'ailleurs, pour que ces voitures électriques circulent, il faut qu'elles puissent se recharger. Il y a huit mois, j'ai ainsi lancé le programme “Métropolis”, qui prévoit
3 084 points de charge nouveaux qui vont être installés, soit à partir des anciens points de d'Autolib' que les maires ont conservés, comme moi, à Rueil-Malmaison, et qui vont être transformés, soit des points nouveaux qui vont être créés.

J'ai même décidé de porter ce nombre à 5 000 points, pour montrer l'effort que la Métropole veut faire dans les deux ans qui viennent. L'installation de ces points de recharges facilitent également la circulation des populations avec des véhicules électriques. Cela prouve que nous avons engagé des actions importantes dans ce cadre.

A.-P. : Ces actions viennent compléter les effets du plan de relance ?

P. O. : Bien entendu, sur la compétitivité de l'activité économique, nous ne sommes pas restés inertes. J'ai conclu un accord avec Valérie Pécresse, qui a créé le Fonds Résilience de 200 millions d'euros pour la région Ile-de-France. J'ai décidé d'abonder ce fonds à hauteur de 14 millions d'euros, pour les entreprises de l'aire métropolitaine. Je viens d'ailleurs de faire le point avec les entreprises du “POLD”, le territoire du pôle Paris-Ouest La Défense pour lister les entreprises qui ont été aidées par ce Fonds Résilience, avec notamment, en son sein, l'aide spécifique de la Métropole.

Nous avons également prévu 10 millions d'euros pour les “Centres villes vivants”, une opération lancée il y a deux ans et qui va être relancé avec ce nouvel investissement, pour aider les villes qui ont beaucoup souffert. Dans ce cadre, pour faire vivre les activités commerciales, les villes peuvent préempter les baux des commerces qui font faillite pour ensuite les céder à d'autres commerçants, en prenant le temps qu'il faut pour réfléchir à la création de nouvelles enseignes, après que la crise sera passée.

Toujours dans le plan de relance, j'ai décidé de mettre à disposition 6 millions d'euros pour aider les hôpitaux sur le périmètre de la Métropole du Grand Paris. Je me suis rendu compte des difficultés que ces établissements affrontaient pendant la crise sanitaire puisque je siège au conseil de surveillance de l'AP-HP.

A.-P. : Êtes-vous intervenus dans d'autres secteurs du quotidien des Métropolitains ?

P. O. : Nous avons également déployé un “pass numérique” doté d'un million d'euros pour lutter contre l'illectronisme et faire en sorte de rendre le numérique accessible à tous.. Si on veut faire face à la crise et participer à la relance du pays, il faut que l'ensemble des Métropolitains soient capables de se servir des moyens numériques pour avoir accès à l'emploi, à la formation, à l'information, etc.

Nous allons également, déployer un maillage métropolitain de structures de reconditionnement de matériel informatique visant à remettre ce dernier en état au bénéfice des populations les plus démunies.

A.-P. : Vous menez d'autres actions, notamment dans la perspective Paris 2024 ?

P. O. : En effet, la Métropole du Grand Paris est maître d'ouvrage du Centre aquatique olympique (CAO), située dans la ZAC métropolitaine de la Plaine-Saulnier à Saint-Denis.

Nous avons engagé l'action de construction, avec le permis de construire qui a été déposé en novembre 2020, un mois plus tôt que prévu au calendrier. Nous sommes actuellement les seuls à être en avance. Ces grandes opérations, que sont le centre aquatique et la passerelle qui permet d'aller jusqu'au Stade de France, sont les seuls équipements pérennes qui survivront après les Jeux. Le Centre aquatique olympique permettra ainsi aux habitants de tout le département de la Seine-Saint-Denis de pouvoir pratiquer la natation.

A.-P. : C'est Bouygues qui va construire ce centre aquatique ?

P. O. : Le Conseil métropolitain du 15 mai 2020 a désigné le groupement, dont Bouygues bâtiment Île-de-France est mandataire, comme futur concessionnaire chargé de la construction, la maintenance et l'exploitation du Centre aquatique olympique (CAO) et du franchissement piéton et cycliste attenant de l'A1. Par ailleurs, après un cycle de négociations, je suis arrivé à faire baisser le prix sans faire baisser la qualité des équipements. Le devis final a été accepté par le gouvernement. J'en suis ravi.

A.-P. : Avec la Région, Paris, la Métropole, les EPCI… on parle aujourd'hui d'un millefeuille administratif. Comment voyez-vous les choses en tant que président de la Métropole ? Vous vous battez pour avoir davantage de prérogatives et de budget. Comment voyez-vous l'avenir ? Vous attendiez aussi des décisions qui devaient venir du président de la République…

P. O. : Aucune décision n'a été prise. Je pense que le président de la République a voulu savoir ce que nous étions capables de faire avec la Métropole telle qu'elle existe pour ensuite prendre les décisions pour aller plus loin. On ne peut pas condamner une métropole qui n'existe que depuis trois ans sur le plan budgétaire et la comparer à d'autres collectivités qui existent depuis des siècles comme les communes, ou depuis des décennies, comme la Région et les départements. C'est un premier point. Deuxième point, “millefeuille” est l'expression couramment utilisée pour faire disparaître. Quand on veut tuer son chien, on dit qu'il a la rage. Là, on parle de millefeuille administratif pour tuer une fois les départements, une fois les territoires, une fois la métropole.

En vérité, de quoi s'agit-il ? Il s'agit d'une répartition des compétences qui ne sont pas les mêmes. La Métropole du Grand Paris est la zone dense où vivent 7,2 millions d'habitants. Cette dernière a besoin de coordination et d'harmonisation au niveau des 131 communes, avec des compétences transversales, afin d'améliorer le cadre de vie de ses habitants, notamment en matière d'écologie, d'attractivité et de rééquilibrage territorial. A ce niveau, par exemple, la Métropole du Grand Paris a lancé deux concours qui ont permis de créer 77 projets immobiliers dans 70 villes différentes où émergeront, à partir de 2021, les premières constructions. C'est colossal. 77 projets qui vont être autant de signaux de l'existence de la Métropole du Grand Paris. Les premiers permis de construire sont déposés et les premières pierres commencent à être posées. Ces deux concours métropolitains représentent 10 milliards d'euros investis par le secteur privé. Il n'y a pas un sou de l'État et pas d'argent de la Métropole.

C'est le plus grand concours d'architecture et d'urbanisme d'Europe, voire du monde. La métropole démontre chaque jour son utilité auprès des communes et de leurs habitants, avec les compétences qui sont les siennes. Ce ne sont pas les compétences de la Région, ce ne sont pas les compétences des départements.

Par exemple, les territoires qui ont été créés au sein de la métropole sont des lieux géographiques où il y a des fiscalités divergentes, contraires au souci de cohésion et d'harmonisation. Est-ce qu'il faut garder cette fiscalité directe dans tous ces territoires ? Je ne le crois pas. Il faut faire en sorte qu'il y ait plus d'unité dans la Métropole du Grand Paris et que les territoires y restent en tant qu'unités déconcentrées avec une gestion de proximité et un conseil des maires des territoires pour aider le directeur à bien respecter ce que les communes souhaitent. Cette simplification de bon sens peut arriver, dans différents domaines, pas forcément nombreux, par exemple, la Métropole pourrait être une autorité en matière d'organisation des transports de deuxième rang ; la Région étant la grande organisatrice des transports. On pourrait prendre en charge les 131 communes de la Métropole du Grand Paris d'une manière forte sur la circulation douce.

Nous sommes la seule métropole de France dont les compétences sont édulcorées par le pouvoir. La métropole de Lyon ou de Toulouse ont beaucoup plus de compétences que la Métropole du Grand Paris.

A.-P. : Il y a une divergence de vue entre la Région et vous ? Valérie Pécresse, par exemple, prétend que la Région peut très bien se substituer à la Métropole. Certains proposent d'englober la petite couronne dans Paris. Donc de votre côté, vous pensez qu'il faut renforcer les prérogatives de la Métropole avec un budget plus important ?

P. O. : Bien sûr, si vous reprenez toutes les propositions qui avaient été faites avant que la Métropole n'existe, celle dont vous parlez de remettre la petite couronne dans la ville de Paris émane de l'époque du maire Bertrand Delanoë. A l'époque, j'assistais aux réunions qu'il organisait avec Charles Pasqua. Cela remonte à une vingtaine d'années. On peut donc reprendre toutes les propositions faites depuis 30 ans et les compiler. Le problème, c'est que l'on tourne en rond, sans jamais rien décider.

Nous avons une situation de fait. Nous serions la seule capitale européenne à ne pas disposer d'une aire métropolitaine. Cette aire, je le répète, doit avoir vocation à gérer la zone dense, c'est à dire la complexité au quotidien, avec des populations empilées dans des étages qui constitue ces 131 villes de la Métropole aujourd'hui. Il faut qu'on soit capable de leur apporter des solutions. Je ne suis pas là pour polémiquer avec Valérie Pécresse, que je soutiens par ailleurs dans son action régionale, ou avec la maire de Paris, qui est ma Première vice-présidente et avec laquelle je m'entends très bien.

Chacun a le droit d'avoir ses idées. Valérie Pécresse pense que la région Ile-de-France va devenir la métropole. C'est nier complètement le fondement même de la création d'une aire métropolitaine. Parce que les champs de blé de Seine-et-Marne et les grandes plaines agricoles de l'Essonne et des Yvelines ne sont pas des territoires métropolitains. Je pense qu'il faut revoir la conception de ce qu'on appelle l'aménagement du territoire. Quoi que vous fassiez, il y aura toujours des effets de seuil. Il y aura celui qui est de l'autre côté du seuil qui dira pourquoi je n'y suis pas. Parce que si vous faites de la Métropole du Grand Paris, la région Ile-de-France, vous aurez les départements voisins qui voudront être intégrés. On ne sort pas des effets de seuil. Ce qu'il faut, c'est avoir des instruments d'aménagement du territoire. Il faut que l'on se demande ce que la Métropole peut apporter aux territoires limitrophes.

On peut leur apporter des conventions stratégiques de coopération qu'on peut signer avec ces territoires, ces EPCI ou ces départements. On peut parfaitement se mettre d'accord sur des actions communes qu'on peut mettre en œuvre, avec des financements communs. La Métropole est prête à y participer, avec des objectifs précis. Dans ces conditions, le problème est réglé. Il ne faut pas être en compétition les uns contre les autres, mais essayer de voir ce qu'on peut faire ensemble, avec des méthodes de travail qu'il faut inscrire dans la loi. Cela s'appelle l'aménagement du territoire.

A.-P. : Pensez-vous qu'on devrait s'inspirer du modèle de la métropole de Londres, par exemple ?

P. O. : C'est ce que j'essaie de faire. C'est le bon exemple que vous donnez. J'ai visité toutes les grandes métropoles européennes. En France, les choses ne se passent pas de la manière qu'ailleurs en Europe, y compris au sujet de la métropolisation.

A.-P. : Peut-être, à l'époque, on cherchait un consensus ?

P. O. : J'ai participé aux débats, j'ai voté contre la loi NOTRe. J'ai souhaité être président parce que je ne voulais pas que quelqu'un vienne casser l'idée métropolitaine. J'ai beaucoup œuvré pour rendre lisible la Métropole du Grand Paris. Aujourd'hui, elle l'est, par rapport aux élus qui sont parfaitement au courant de ce qui est fait. Quand nous avons lancé les concours “Inventons la Métropole du Grand Paris”, il y a eu chaque fois entre 1 400 et 1 500 personnes qui sont venues soutenir cette initiative. Il y avait des notaires, des architectes, des aménageurs, des promoteurs, des banquiers. C'était extraordinaire et toutes ces personnes savent ce que la Métropole veut dire et ce qu'on apporte. Bien sûr, vous avez des élus qui préfèrent la région. Nous entrons dans des polémiques qui n'ont aucun sens par rapport à l'efficacité que je veux donner à l'action que nous menons pour la population. Ce qui m'intéresse, c'est cela et seulement cela.

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